3ème PARTIE

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Bollène sous la botte hitlérienne
1942-1943 vers des actions de sabotage

La bataille du rail
Nombreuses actions de sabotage
Sabotage de pylônes électriques
Actions individuelles
Sabotage d’une réunion de la Légion
Les femmes dans la Résistance

Confection de fausses cartes d’identité
Les réseaux de renseignements
Fidèles au 14 juillet et au 11 novembre
Commémoration du 11 novembre

Manifestation à Valréas le 11 novembre 1942
La "Relève" ne fait pas recette à Bollène
Jeunes, refusez de partir, gagnez la montagne !
Que disent les rapports de police?
Ami, si tu tombes
La chasse aux Résistants

11 août 1943 opération contre les groupes F.T.P. du canton de Bollène
Attentat contre la Légion française des combattants
Liste d’otages
La milice de Pétain digne de la Gestapo
Les collaborateurs seront châtiés
Au temps des longues nuits

Les juifs persécutés, pourchassés, déportés
Le maquis d’Uchaux dit "la Villa Rose"
De nombreux jeunes gagnent les maquis de la région
Des immigrés aux côtés des patriotes français

La dure vie des maquis
Rendons à César ce qui appartient à César
Des actions qualifiées de "terrorisme"
La marche vers la Libération
Les parachutages d’armes
1943-1944 la répression s’amplifie
Un acte de barbarie 159

La commune a pris un air de deuil
La garde de la voie ferrée un total échec
La rafle du 11 mai 1944
Témoignages

Deux tortionnaires démasqués
Les internés de la citadelle auraient-ils été victimes d’une dénonciation?
Le 28 mai 1944
Perquisitions et pillages

La peur d’un policier de Vichy
Premières attaques contre les Allemands

Bollène sous la botte hitlérienne.

1942-1943 : vers des actions de sabotage

Le 11 Novembre 1942, rompant les accords de l'Armistice, la Wehrmacht occupe la zone sud appelée jusqu'à ce jour " la zone libre".

Les habitants du canton de Bollène et les Résistants ont à faire face à une situation nouvelle. Ils vont être directement et chaque jour en contact avec l'occupant. D'abord les troupes italiennes, puis rapidement avec des unités nazies.

Dans ces conditions nouvelles la Résistance grandit rapidement. Les Résistants poursuivent et intensifient la distribution des tracts clandestins, dans des conditions de plus en plus difficiles. Ils s'orientent maintenant vers des actions de sabotage de la machine de guerre allemande. Les premiers groupes de Francs Tireurs et partisans apparaissent à Bollène et dans le canton. Leur armement est des plus rudimentaires, essentiellement des revolvers pris quelques fois sur les soldats ennemis.

Ils sont sédentaires, c'est à dire qu'une fois constitués ils restent sur place dans leur quartier ou leur village, composés d'ouvriers, de paysans, de cheminots, d'instituteurs, d'employés qui continuent à travailler dans leurs emplois respectifs. On y trouve aussi des Résistants clandestins, cachés dans des fermes de la région comme le Marseillais Eugène Bertrand dit Marcel. De leur côté les gaullistes constituent les "Corps Francs". Un des chefs dans le département du Vaucluse fut Jules Ten, qui après la Libération, vint habiter Bollène.

Ce sont ces combattants "sans uniforme " que l'on appela " l'armée de l'ombre " car ils agissaient essentiellement la nuit et dans le plus grand secret. Les groupes FTPF du Nord Vaucluse mènent essentiellement des actions de sabotage sur la ligne de chemin de fer Paris-Lyon-Marseille empruntée par de nombreux convois ennemis. Ils participent à ce que l'on a appelé "la Bataille du RAIL".

Ils mènent également des actions de sabotage contre les pylônes électriques à haute tension qui transmettent l'énergie nécessaire au fonctionnement des usines au service de l'occupant.

Des équipes spéciales se livrent à des actions de récupération de cartes d'alimentation dans les mairies pour permettre aux clandestins de vivre, ainsi que de vêtements, de véhicules, de matériel, d'essence dont les maquis ont besoin.

La victoire de STALINGRAD le 2 Février 1943 et les premiers reculs des armées hitlériennes sur le front russe vont stimuler les actions des Résistants Bollénois. La Wehrmacht, cette armée soit disant invincible, bat en retraite !. La victoire de la liberté sur la barbarie se profile à l'horizon.

Déjà le débarquement des Alliés et d'unités des Forces Françaises Libres en Afrique du Nord le 8 Novembre 1942, avait suscité bien des espoirs.

L'unification de la Résistance et la création du Conseil National de la Résistance le 27 Mai 1943 sous la présidence de Jean Moulin, vont coordonner et décupler les actions des Résistants.

Les Bollénois vivent avec intensité tous ces évènements. Malgré l'interdiction, les risques encourus, ils écoutent de plus en plus nombreux les émissions de la "France libre" sur la radio de Londres.

Certains arrivent à capter sur radio Moscou les émissions en français de l'écrivain Jean Richard Bloch et ne se gênent pas pour les répercuter autour d'eux par le bouche à oreille.

Les communistes prennent toute leur part dans les actions de sabotage. L'Humanité clandestine du 18/12/1942 déclarait :

" Chaque membre du parti ne laissera pas passer une journée sans accomplir un acte de sabotage et de destruction nuisible à l'ennemi ".

Ils apportent un soutien de plus en plus efficace aux actions de la Résistance contre Vichy et l'occupant. C'est ce que note le commissaire de police de Bollène, dans son rapport du 24 Mars 1943 :

" On sent nettement que les esprits sont surexcités…Ex-communistes et ex-radicaux ne cachent pas leur anti-collaborationniste. Pendant le mois, trois distributions de tracts ont eu lieu. Tous émanent de l'organisation communiste, invitant les jeunes gens ou les ouvriers à ne pas partir travailler en Allemagne…C'est sans enthousiasme que les hommes de 18 à 65 ans se prêtent à la réquisition organisée pour la surveillance des voies ferrées. Cette surveillance est pratiquement nulle. Les requis se contentent de passer le plus agréablement possible leurs 12 heures de faction ".

(A.D. Vaucluse 3W19)

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La Bataille du Rail

L'objectif était de gêner le plus possible la circulation des transports ennemis.

Le 18 Septembre 1942, le commissaire de police de Bollène signale le premier acte de sabotage sur la voie ferrée. Cet acte n'a pu être mené à bien que par des connaisseurs, probablement des cheminots. Cette nuit-là, devait passer en gare de la Croisière le train spécial de l'amiral DARLAN.

Ce fut une des premières actions de sabotage menée par les Francs Tireurs et Partisans (FTP) qui commençaient à se constituer dans le canton de Bollène. Il faut souligner qu'à ce moment-là, les FTP ne possédaient pas encore d'explosifs pour faire sauter les rails.

Un des groupes les plus actifs dans cette Bataille du Rail était celui de la Croisière,

composé d'Henri SABATIER agriculteur, Eugène BERTRAND employé de commerce, Louis DUGAS dit « LOULOU », cheminot à la gare de La Croisière et Léon DUGAS ouvrier. Une stèle a été élevée à leur mémoire devant la gare.

Il y avait aussi d'autres groupes de ces combattants " sans uniforme " qui agissaient la nuit. Le cultivateur Charles RAMIERE animait un de ces groupes à BOLLENE.

 

A MONDRAGON c'était son frère Marin RAMIERE épaulé par Henri JAVELLE

et Louis ROCHE, habitant tous les trois au quartier Notre Dame des Plans, à proximité de la ligne de chemin de fer.

D'autres groupes FTP se constituèrent parmi les cheminots notamment à Avignon et PERTUIS.

Dans le reste du département, les sabotages et les coups de main contre les forces d'occupation furent surtout l'œuvre des " Corps Francs " crées par l'A.S (armée secrète gaulliste).

La difficulté la plus grande était de se procurer des explosifs, car les FTP du canton ne bénéficiaient pas des parachutages anglo-américains réservés essentiellement à l'A.S.

Au début, les FTP de la Croisière allaient, à bicyclette, se procurer de la dynamite dans une carrière située entre PONT Saint ESPRIT et St ETIENNE DES SORTS. Par la suite, ils reçurent, par des voies plus secrètes, du " plastic ", explosif beaucoup plus maniable et efficace.

Voir document: Rapport journalier du commissaire de Bollène

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Nombreuses actions de sabotage

Les archives départementales du Vaucluse conservent les rapports des Renseignements généraux et de la gendarmerie sur les actions de sabotage les plus importants :

Mars 1943 : sabotage du fil de commande du disque de la voie ferrée à MONDRAGON.

Quartier de la MADELEINE, le fil de transmission a été coupé sur une longueur de 6 mètres, probablement au moyen d'un burin, et a été emporté.

9 Avril 1943 : en gare de LAPALUD le disque de signal a été bloqué à l'aide d'une pierre.

19 Mai 1943 : dans la nuit, attentat sur la voie ferrée à MONDRAGON. la même nuit, explosion d'une bombe près de la gare de BOLLENE. Trafic interrompu pendant plusieurs heures.

20 Juin 1943 : 3h30. Sabotage sur la voie ferrée entre Bollène et Lapalud. Un rail complètement sectionné par un explosif sur une longueur de 25cm. Les deux requis civils chargés de la surveillance n'ont pu donner aucun renseignement.

17 Juillet 1943 : acte de sabotage. Un rail a sauté sur la ligne Avignon-Lyon, sur la commune de Mondragon. Le trafic a été arrêté jusqu'au 18 Juillet à 1h05.

21 Août 1943 : deux explosions font sauter des rails près de la gare de Bollène.

26 Août 1943 : dans la nuit, vers 2h45, attentat par explosif sur la voie ferrée en gare de Bollène la Croisière. Le moteur d'un locotracteur a été détérioré ainsi que deux fils téléphoniques. Un train de voyageurs a été stoppé. La circulation n'a été rétablie qu'à 5h20. Cette action a été menée par Henri SABATIER (voir témoignage de Charles MONIER page *

11 Novembre 1943 : " Vers 0h45, sur le pont du LEZ à Mondragon, un attentat a été commis. Les deux rails de la voie n°1 ont été sectionnés par une explosion, sur une longueur de 30cm.

Vers 5h, acte de sabotage sur la voie ferrée à Bollène. Une bombe a éclaté au passage d'un train de marchandises. Deux rails ont été sectionnés, les fils téléphoniques arrachés, mais aucun accident de personnes ".

Les Résistants Bollénois avaient trouvé là, le moyen de commémorer à leur façon la victoire du 11 Novembre 1918, en réponse à l'interdiction par Vichy de toute commémoration.

A partir de1944 les actions de sabotage vont s'intensifier.

20 Février 1944 : à 1h25, attentat sur la voie ferrée près de Mornas. La voie a été coupée sur une longueur de 30 à 40cm. Pas de déraillement. Circulation interrompue durant 5 heures.

25 Février 1944 : Eugène BERTRAND, dit Marcel, du groupe FTP de la Croisière

participe avec des maquisards de la Drôme à un important acte de sabotage sur la voie ferrée dans le défilé de DONZERE. Un convoi allemand déraille. Plusieurs wagons plongent dans le Rhône. Du haut des rochers les FTP mitraillent et lancent des grenades. Grosses pertes pour l'ennemi. Les maquisards décrochent facilement et disparaissent dans la nature.

2 Juillet 1944 : vers 0h30 un engin explosif a sectionné les rails à PIOLENC. La circulation a été rétablie le même jour.

11 Juillet 1944 : vers 22h, un nouvel attentat par explosif a sectionné les voies sur la commune de PIOLENC.

12 Juillet 1944 : vers 2h15, voie ferrée coupée entre les points 698950 et 699030, commune de MORNAS.

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Sabotage de pylônes électrique

L'occupant avait un impérieux besoin d'énergie électrique.

C'est pourquoi les FTP de Bollène réalisent plusieurs actions de sabotage contre les pylônes électriques qui soutiennent les lignes haute tension traversant la vallée du Rhône.

Voici le rapport du commissaire de police de Bollène en date du 9 Mai 1943 :

10 Juillet 1944 : deux pylônes de la ligne électrique ROMANS-VENEJEAN ont été sabotés à l'aide d'explosifs, à 2h, sur la commune de LAPALUD.

(Rapport de gendarmerie A.D Vaucluse)

 

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Actions individuelles

La plupart des actes de sabotage ont été réalisés par des groupes bien organisés et expérimentés.

Des Résistants se livrent également à des actes de sabotages individuels.

Fin 1940, l'Alsace est annexée par Hitler. Pour éviter d'être enrôlé de force dans la Werhmacht, André ACKERMANN s'enfuit et vient se réfugier à Bollène. Avec lui Jean SCHAPLER et GRIGNON.

Voici le témoignage d'André ACKERMANN extrait de ses souvenirs :

" Au début 1941, je trouve du travail à l'usine VALUY de Bollène la Croisière où je ne tarde pas à voir se manifester la Résistance. Une distribution de tracts appelant à la résistance ayant eu lieu à l'usine, la police enquêta. Elle en fut cependant pour ses frais. Tout le monde savait que les tracts venaient de l'instituteur communiste révoqué par Vichy et devenu manœuvre à l'usine. Personne ne parla.

C'est à cette époque que j'ai commencé mon action résistante. J'habitais au bord d'une voie de garage où se trouvaient en partance pour l'Allemagne des wagons citerne remplis des excellents crus de la région. Chaque nuit j'introduisais du sable dans les boîtes à huile, ce qui, inévitablement allait provoquer des chauffages de boîtes et peut-être, avec un peu de chance, une rupture de fusée.

Une nuit, entre deux wagons, je tombai nez à nez avec un gars du Nord qui travaillait également à l'usine Valuy. Il me dit qu'il venait de saboter les boîtes depuis la queue du train. Comme de mon côté j'avais fait de même en partant de la tête, le travail était terminé pour ce jour-là.

De cette nuit datent des relations plus organisées avec la Résistance ".

Par la suite André ACKERMANN rejoint les maquis du LUBERON. Il participe à de nombreuses actions menées sous le commandement d'un Vauclusien, le colonel Fernand VIGNE dit " Jacques ". On le retrouve dans les combats pour la libération d'ALES.

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Sabotage d'une réunion de la Légion

Quelques employés de la Société Sud Electrique de Bollène constituent un groupe de résistants. Le responsable est Edmond GACHET. Avec lui Alphonse CHAIX et Désiré GOFFRE de Bollène, BOIRON de Romans et deux ou trois autres.

Le groupe distribue des tracts clandestins apportés par Edmond GACHET. Alphonse CHAIX se souvient d'une autre action couronnée de succès. Il raconte :

" Un jour nous apprenons que la Légion des combattants créée par Pétain doit tenir une importante réunion au château du Rocher (aujourd'hui la Belle Ecluse). Nous décidons de leur créer quelques ennuis. A partir d'une fenêtre du restaurant ZAPPOLATO, rue A. France, nous provoquons un court circuit sur la ligne électrique passant devant la fenêtre. Le transformateur électrique de la place de la Mairie explose. Durant toute la nuit le quartier et le château du Rocher sont privés d'électricité.

Ces messieurs de la Légion sont obligés d'annuler leur réunion, ce qu'ils n'apprécièrent certainement pas puisqu'ils firent appel à la police allemande pour mener une enquête. Fort heureusement les "coupables" ne furent pas découverts ".

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Les femmes dans la Résistance

Elles furent nombreuses à Bollène comme dans toute la France à s’engager dans la Résistance.

Certaines furent des agents de liaison irremplaçables, assumant avec courage des missions importantes et dangereuses. La plupart étaient des jeunes filles. A l’âge où l’on songe à vivre heureuse, à fonder un foyer, elles n’hésitèrent pas, sachant les risques qu’elles encouraient: l’arrestation, la torture, la déportation et même la mort.

Nous gardons le souvenir de quelques unes d’entre elles: Simone AUVILLE dont le mari était prisonnier de guerre, Elise DUGAS, Andrée BLACHERE, Germaine BODIN, Marinette SIBOUR, MADO, Mme Lucien PIQUEMAL. Et sans doute, bien d’autres encore qui sont restées dans l’anonymat. Ce qu’elles ont fait ? On ne le saura sans doute jamais!

Laissons la parole à l’une d’entre elles, Mlle Andrée BLACHERE, jeune paysanne de Bollène La Croisière:

"J’ai rejoint la Résistance en Juillet 1943. J’avais à peine 21 ans. J’étais adhérente au FUJP (Front Uni des Jeunes Patriotes). En octobre ou novembre un responsable de cette organisation me confia une mission qui reste gravée dans ma mémoire. Il fallait transporter une valise contenant des tracts et des armes de Valence à Avignon. En me la remettant en gare de Valence, il me dit: "A la sortie de la gare d’Avignon, les Allemands contrôlent les voyageurs, notamment les hommes. Les femmes, surtout si tu leur fais un charmant sourire, passent plus facilement. Mais tout de même sois très prudente. Tu remettras la valise à un homme qui se trouvera devant le café, à gauche, en sortant de la gare. (Aujourd’hui ce café n’existe plus). Il tiendra à la main droite un exemplaire du journal de l’époque « le Petit Marseillais »". Je prends donc le train avec l’insouciance d’une jeune fille de 20 ans. Je m’installe dans un compartiment, la précieuse valise, dans le filet à bagages, assez loin de moi, en cas d’un contrôle toujours possible et imprévu.

Au moment où le train démarre, trois militaires allemands dont un jeune et élégant officier, s’installent dans le compartiment. Celui-ci se fait entreprenant, tout sourire. Il me dit que la France est un beau pays, surtout la Côte d’Azur et m’invite à aller y passer quelques jours avec lui.

Enfin nous arrivons en gare d’Avignon. Je prends ma valise et me prépare à affronter le contrôle allemand. Une angoisse terrible me serre à la gorge. La sueur dégouline le long de mon dos. J’aperçois tout à coup mon jeune officier qui se prépare à sortir. Une chance. Un réflexe. Je me mets à côté de lui en souriant. Nous passons, évitant ainsi le contrôle.

Ouf! Je suis sur la place. Mais il faut maintenant que je me débarrasse de lui... et de ma valise. Je lui donne rendez-vous au buffet de la gare. J’aperçois celui qui m’attend avec son journal à la main droite. Je lui tends avec soulagement la valise, il me remet son journal sans un mot et disparaît rapidement. Mission accomplie. J’en suis fière mais je m’en souviendrai toujours. Quant à mon bel officier, inutile de vous dire qu’il m’attend toujours!

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Confection de fausses cartes d'identité

La Résistance à Bollène, ce n'est pas seulement la distribution de tracts clandestins et des actions de sabotage.

C'est aussi la confection de fausses cartes d'identité pour les clandestins et les patriotes recherchés par la police.

Mmes Pierrette RAUD et Emma ICKOWICZ employées à la Mairie de Bollène, avec l'aide du jeune BLACHE, se servaient du tampon du commissaire de police pour fabriquer de fausses cartes d'identité.

La jeune Germaine BODIN, âgée de 21 ans, allait à bicyclette à Orange, pour faire établir de fausses cartes d'identité pour les Juifs et les réfractaires au STO.

Les Résistants recherchés par la police devenaient des « clandestins » obligés d’abandonner leur domicile et leur famille et de changer d’identité. Quelquefois plusieurs fois.

Pour des raisons de sécurité les organisations de Résistance leur attribuaient un « nom de guerre ». Les Résistants entre eux ne se connaissaient que sous ce nom, ignorant la véritable identité.

Ainsi Jules TEN était le capitaine CRILLON, DUFOUR le capitaine PARIS, Max BERTRAND le commandant LAMOTTE, Eugène BERTRAND le commandant MARCEL, Jean GARCIN le colonel BAYARD, Ellen ROBERT était PORTHOS et Charles MONIER ORESTE etc…

 

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Les réseaux de Renseignements

Des réseaux de Résistants se spécialisaient dans la recherche de renseignements. Voici le témoignage de M. Gaston LAMBERT de Bollène :

" Un jour de l'été 1943, M.M. RIPERT et MILHAUD, membres du Parti radical socialiste nous ont demandé d'héberger deux officiers, un Français et un Américain, munis d’un poste émetteur qui leur permettait d'être en liaison avec ALGER et LONDRES.

Ils avaient pour mission de préparer le débarquement de troupes alliées sur les côtes de Provence et de fournir tous les renseignements utiles à la réalisation de ce plan. Je me suis efforcé de les aider au maximum en glanant, au cours de mes déplacements dans la région, toutes les informations qui pouvaient leur être utiles.

Avec mon épouse, nous les avons hébergés environ un mois. Craignant d'être repérés par un véhicule de détection de la Wehrmacht, un matin, ils déménagèrent rapidement vers un autre lieu moins exposé ".

La ferme de M. LAMBERT se trouvait en bordure de la route reliant Bollène au hameau de La Croisière, sur l'emplacement actuel du canal DONZERE-MONDRAGON.

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Fidèles au 14 Juillet et au 11 Novembre

Tout en menant des actions de sabotage, les Résistants multiplient les distributions de tracts clandestins notamment pour commémorer le 14 Juillet et le 11 Novembre.

Le 14 Juillet 1942, malgré le maintien en alerte des services de police et de gendarmerie et le renforcement de la brigade de Bollène par quatre gendarmes, de nombreux tracts sont distribués dans tout le canton. Un rapport de gendarmerie signale des distributions de tracts à tendance communiste à Bollène et la découverte à Mondragon de papillons collés émanant du Secours Populaire de France

Le 14 Juillet 1943 , le commissaire de police signale dans son rapport :

" De nombreux tracts ont été découverts en ville et aux abords de l'agglomération. Ces tracts sont tous d'inspiration communiste. Un seul d'entre eux émane de la section communiste à Bollène. Il invite la population à manifester à 18h30 sur le cours du LEZ...

Je me rends sur les lieux avec un service d'ordre discret…. Quelques drapeaux tricolores mis aux fenêtres ont été aussitôt retirés après intervention de mes services, notamment celui placé à la perception…

… La population, en majorité républicaine, ne cache pas son mécontentement de ne pouvoir fêter dignement une fête qu'elle considère comme sacrée ".

( A.D. Vaucluse 3W19 )

Quelques semaines plus tard, le Percepteur M. Emile LACHAUX, après avoir été inscrit sur la liste S (suspects) avec la mention "communiste", était arrêté et déporté dans un camp de la mort du 3ème Reich. Il n'a jamais revu Bollène. M. LACHAUX n'était pas communiste, mais un Républicain sincère qui avait à cœur de fêter la Fête nationale de sa Patrie. C'était sous Vichy un crime impardonnable.

Dans son rapport du 26 Juillet 1943 au Préfet, le commissaire revient sur la journée du 14 Juillet :

" Une fois encore, j'ai pu constater que dans sa quasi unanimité la population locale est anti-gouvernementale et anti-collaborationniste… La population en majorité républicaine ne cache pas son mécontentement de ne pouvoir fêter dignement une fête qu'elle considère toujours comme sacrée…

Aucune activité politique, si ce n'est l'ex Parti communiste qui pour le 14 Juillet a inondé la ville de tracts… ".

( A.D. Vaucluse 3W19 )

A la lumière de ce rapport on peut mesurer l'évolution de l'état d'esprit des Bollénois. En juin 1940 ils résignés et font confiance au maréchal Pétain. Le 14 Juillet 1943 on ose mettre aux fenêtres le drapeau national symbole de la République. Le travail des Résistants, allié aux premières victoires des forces alliées, porte ses fruits.

Le gouvernement de Vichy redoute particulièrement les commémorations du 14 Juillet. Il veut faire oublier tout ce qui rappelle la République. Il donne des instructions de plus en plus restrictives au fil des années et de la montée de l'opposition aux atteintes à la liberté :

14 Juillet 1941 : Pavoisement et illumination des monuments.

14 Juillet 1942 : Pavoisement seulement.

14 Juillet 1943 : Interdiction de toute réunion et de tout rassemblement sur la voie publique.

14 Juillet 1944 : Faire garder tous les points sensibles.

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Commémoration du 11 Novembre :

 

Nombreuses distributions de tracts et en 1943 sabotage de la voie ferrée à MONDRAGON.

Que dit le commissaire de police dans ses rapports au Préfet ?

11 Novembre 1941 : " De nombreuses surveillances nocturnes effectuées dans la localité et dans les environs, ont ôté aux membres de l'ex-Parti communiste, toute velléité de se réunir clandestinement… ."

11 Novembre 1942 : Interdiction par le Préfet de tout rassemblement devant les monuments aux morts. Les organisateurs seront immédiatement arrêtés. Il prend des mesures pour réprimer toute manifestation. Il fait venir à Bollène pour renforcer la brigade de gendarmerie, 9 gendarmes et 30 gardes mobiles. Malgré ces mesures, le commissaire de police signale : " le 10 Novembre quelques tracts ont été distribués dans les rues. Dans la nuit de nombreux ont été lancés "

( A.D. Vaucluse 3W90 )

Un rapport de gendarmerie note que " dans la nuit du 8 au 9 Novembre des tracts à tendance communiste et gaulliste, invitant les ouvriers à faire grève le 11 Novembre, ont été lancés sur la voie publique à Bollène, Ste Cécile et Valréas ".

( A.D. Vaucluse 3W19 )

Les R.G du Vaucluse confirment le 13 Novembre 1943 : " Propagande communiste : une grande quantité de tracts ont été distribués dans tout le département… notamment à Valréas et Bollène ".

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Manifestation à VALREAS le 11 Novembre 1942

Le 24 Novembre, 1942 le chef d'escadron commandant la gendarmerie du Vaucluse signale au Préfet, qu'après une importante distribution de tracts à Bollène et Valréas dans la nuit du 8 Novembre " une manifestation a eu lieu à VALREAS , où une centaine de personnes se sont rassemblées le 11 Novembre au Monument aux morts, malgré la présence de deux gendarmes qui, débordés, n'ont pu empêcher le dépôt de deux gerbes de fleurs. L'instigateur de cette manifestation a été immédiatement l'objet d'une mesure d'internement administratif… Dans plusieurs centres importants

( Avignon, Apt, Carpentras, Bollène, Cavaillon, Pertuis, Vaison ) des manifestations semblables auraient eu lieu certainement si des forces de police importantes n'avaient été déplacées…"

( A.D. Vaucluse )

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La "RELEVE " ne fait pas recette à Bollène

Hitler a un besoin pressant de main d'œuvre pour remplacer les jeunes allemands mobilisés. A sa demande LAVAL lance un appel à la " relève " en utilisant un slogan trompeur : " Pour chaque ouvrier allant travailler en Allemagne, un prisonnier de guerre reviendra dans son foyer ".

La réalité était tout autre.

Le 13 Février 1943, les R.G. indiquent que dans le département, 54 ouvriers sont partis pour l'Allemagne et que 7 prisonniers ont été rapatriés au titre de la " relève ".

Les groupes de Résistants s'efforcent d'informer la population par tracts sur la tromperie des maîtres de Vichy. Le milieu ouvrier bollénois étant nettement opposé à la " relève ", c'est le fiasco le plus total.

Devant le peu de résultats obtenus, LAVAL annonce en Février 1943 la création du service du travail obligatoire (S.T.O).

Puisque les ouvriers Français ne sont pas volontaires pour aller travailler en Allemagne, on va les obliger. Faux calcul. L'esprit de résistance au S.T.O va se manifester rapidement chez les jeunes soutenus par la population. Les réfractaires deviennent de jour en jour plus nombreux. Pour les organisations de la Résistance un nouveau et important problème se pose.

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Jeunes refusez de partir, gagnez la montagne

Le 3 Mars 1943, le commissaire de police informe le Préfet : " Ce matin, au cours d'une ronde l'agent P… a découvert des papillons collés sur des murs et des poteaux au cours de la nuit. Libellés à la main ainsi qu'il suit :

 

Mères de famille, femmes ne laissez pas

pas partir vos fils, vos maris qui vont

être incorporés dans l'armée allemande,

iront mourir sur le front russe.

Jeunes, formez vos comités de Résistance,

refusez de partir. Gagnez la montagne.

Formez des groupes qui iront chez les

paysans qui vous ravitailleront.

Vive la France

Signé : Le Front national pour l'indépendance

( A.D. Vaucluse 3W19 )

 

Exemple de convocation pour le Service du Travail Obligatoire en Allemagne (S.T.O.) :

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Que disent les rapports de police ?

Le commissaire de Bollène écrit :

5 Mars 1943 : " Une trentaine d'ouvriers d'usine devant passer ces jours-ci une visite médicale en vue d'un départ éventuel en Allemagne… la population ouvrière ne cache pas son mécontentement ".

et le 24 Juillet 1943 : " l'opinion publique reste toujours aussi hostile au départ des jeunes en Allemagne ".

22 Mars 1943 : Rapport du capitaine commandant la compagnie de gendarmerie de Vaucluse (Extraits) :

" Propagande antinationale : Au sujet de la " relève " un tract appelant les fonctionnaires de police et les magistrats à refuser leur concours, a été adressé à presque toutes les brigades de gendarmerie…

Un fait domine tous les autres : "la Relève ", personne n'y croit plus. C'est le cœur serré et les poings aussi que les jeunes partent en Allemagne…

Conclusion : Situation qui empire chaque jour. On attend une issue à cette longue guerre. Nombreux sont ceux qui demandent seulement la fin, pour revivre et pour manger ".

De leur côté les policiers des Renseignements généraux notent :

le 23 Mars 1943 : " Divers tracts de propagande gaulliste et communiste ont été découverts au cours du mois écoulé à Bollène.

Certains de ces tracts s'élèvent contre " la relève " et prêchent la désobéissance civile.

D'autres manuscrits invitent les paysans à s'opposer à la réquisition de leurs produits ".

et le 14 Avril 1943 : " En ce qui concerne le recrutement de la main d'œuvre pour l'Allemagne, la population du département, malgré une apparence de résignation, n'en demeure pas moins défavorable au principe de la relève. De nombreuses personnes semblent même favoriser les défections en organisant de véritables groupes de résistance qui permettent aux jeunes gens astreints au S.T.O de se camoufler dans certaines régions accidentées ".

Des familles bollénoises acceptent d'héberger et de cacher les jeunes réfractaires au S.T.O. Malgré les risques et le manque de ravitaillement, ces familles acceptent de les nourrir en attendant leur départ vers les régions montagneuses où se constituent les premiers maquis.

Citons les familles : SIBOUR Auguste, CARRIGI , BOUCHET, BOISSIN de Bollène, DUGAS Louis, MONIER, RAMIERE Charles, BODIN de La Croisière, VINCENT, JOURDAN de Lapalud, RAMIERE Marin et MEGIER de Mondragon, SABATIER de Lamotte du Rhône et bien d'autres que nous n'avons pas pu détecter.

Il est certain que bien d’autres familles du canton ont caché des Résistants clandestins et des jeunes réfractaires du S.T.O. Nous ne pouvons les citer, car malgré nos efforts, plus de 50 ans après ces évènements, nous n’avons pu les détecter.

C'est de La Croisière que Max BERTRAND futur maire d'ENTRAIGUES (Vaucluse) fut dirigé sur le maquis où il devint le commandant FTP LAMOTTE.

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Ami, si tu tombes…

Au cours de l'année 1943, les distributions de tracts clandestins, les actions de sabotage, les attaques contre les soldats nazis et les miliciens de Vichy se multiplient à Bollène et dans le canton encouragées par les événements comme la démission de Mussolini. La bataille du rail menée par les groupes FTP du Nord Vaucluse se développe. Une véritable " guérilla " qui démoralise les soldats allemands. L'occupant et ses valets Vichystes s'en inquiètent et se lancent dans une répression impitoyable : perquisitions, arrestations, déportations, assassinats.

Ils veulent par la terreur stopper la montée de la Résistance. Cependant la population ne se laisse pas impressionner et continue à afficher ses sentiments et sa joie à l'annonce de tout événement laissant apparaître la défaite prochaine des envahisseurs.

Le 25 Juillet, le commissaire de police note : " La nouvelle de la démission de Mussolini a éclaté à Bollène comme une bombe. La population ne cache pas sa joie ".

 

Les Résistants communistes subissent une répression terrible. Nombre d'entre eux sont déportés ou fusillés. Le Parti communiste clandestin résiste et intensifie la lutte.

13 Mars 1942, témoignage de Roger GARREAU représentant du général de Gaulle :

" Le Parti communiste qui est le parti le mieux organisé de France et se trouve à l'avant garde du combat anti-hitlérien, joue un rôle particulièrement actif dans cette lutte… Son rôle est d'autant plus remarquable que les Allemands et le gouvernement de Vichy ont fait peser tout le poids de leur répression, en premier lieu, sur ce Parti… ".

(source : Chronique de la Résistance d'Alain GUERIN).

D'autre part, une synthèse des rapports des Préfets de Mai 1943, sur l'activité communiste, indique :

" Les perquisitions massives, les nettoyages de zones, les nombreuses arrestations opérées depuis deux mois ont évidemment un résultat notable…

Toutefois, en face des embryons de mouvements, des squelettes de groupements de toutes sortes, le Parti communiste est la réunion organisée des forces antinationales. Traqué, harcelé, il n'en est que plus puissant et plus agressif. Son activité semble évoluer vers une nouvelle période, celle de l'insurrection armée qui coïnciderait avec le déclenchement d'opérations militaires affectant le sol de France. Le gros atout des communistes semble être actuellement les défaillants du S.T.O… qui forment les groupes de francs-tireurs. Les préfets notent le développement des sabotages sur les voies ferrées, usines, pylônes électriques… et font état de toute une liste d'actions armées dans plusieurs départements…

Des rafles et descentes de police monstres ont été faites dans les principales villes de plusieurs départements dont le Vaucluse…".

(A.D Vaucluse 3W27)

N'est-ce pas là, la reconnaissance du rôle décisif de la Résistance intérieure dans la marche vers la libération de la patrie ?

Malgré une répression brutale, les forces de la Résistance grandissent rapidement, car comme le dit l'admirable chant des partisans :

"Ici chacun sait

ce qu'il veut, ce qu'il fait

Quand il passe...

Ami si tu tombes

Un ami sort de l'ombre

A ta place..."

Bollène et le canton tiennent une place honorable dans les combats de la Résistance.

Les forces d'occupation épaulées par les miliciens de Bollène et d'Avignon ne vont pas tarder d'entrer en action. Ils vont s'efforcer de découvrir et d'arrêter les résistants et plus particulièrement ceux qui se livrent à des actes de sabotage et qu'ils appellent des " terroristes ".

 

BOUCHET Albert René

(1901-1944)

De 1929 au 25 mai 1944, ouvrier chez VALABREGUE, produits réfractaires à Bollène, comme chauffeur briquetier.

Retrouvé mort, écrasé par un monte charge, à 6h du matin le 25 mai 1944. Cet accident du travail n’a jamais pu être expliqué. Aurait-il été provoqué ?

Albert BOUCHET, membre du Parti Communiste dés sa formation à Bollène en 1920, après le congrès de TOURS. Responsable de la section du Parti Communiste clandestin, de 1943 jusqu’à sa mort, en remplacement de Charles RAMIERE parti au maquis dans l’Ardèche.

Il participe activement à la lutte contre l’envahisseur hitlérien, organise un camp de jeunes F.T.P.F. et en assure la bonne marche. Il développe l’activité clandestine de la section communiste, assurant les liaisons, n’hésitant pas à parcourir les routes et les chemins à vélo, les sacoches pleines de tracts, sachant très bien que s’il était arrêté, il serait fusillé. Comme tous ceux qui militaient illégalement, il faisait preuve de courage et d’abnégation.

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La chasse aux Résistants

Dès le début de l'année 1943, la répression se déchaîne, dure, impitoyable, souvent aveugle.

Aux archives départementales du Vaucluse on trouve à ce sujet les rapports sur les actions répressives menées dans le département et notamment dans la région de Bollène contre les résistants.

Tous y participent : SS, gestapo, police spéciale de Vichy, milice, gendarmerie, police locale.

Un résistant à tout instant peut être arrêté. Mais les policiers ont une prédilection pour le matin, à l'aube, au saut du lit. A l'heure du laitier comme on disait à cette époque.

27 Janvier 1943 : Perquisition ordonnée par le Préfet du Vaucluse chez M.Andres BONJORN, 24 ans, demeurant quartier de la ROUBINE à Bollène.

5 Mars 1943 : Arrestation de M. Maurice MALBOIS, 42 ans, bourrelier au PUY, pour reconstitution de la cellule communiste et menées antinationales. Déféré au tribunal spécial de Lyon.

(A.D. Vaucluse 3W19)

Le journal régional clandestin ROUGE-MIDI dans son numéro du 27 Mars relate l'arrestation de Maurice MALBOIS en ces termes :

« A Bollène les policiers au service d'Hitler viennent d'arrêter un patriote accusé d'avoir lutté pour l'indépendance de la France. S'inspirant des méthodes hitlériennes, les policiers ont frappé ce patriote avec sauvagerie et lui ont crevé un œil. Il faut que ces criminels sachent que tous les patriotes seront vengés. »

(A.D. Vaucluse : Rapport des Renseignements Généraux)

15 Avril 1943 : « BETRANCOURT Armand né le 17/7/1922 dans le département du Nord, réfugié à Bollène, est arrêté par les autorités italiennes, ainsi que VIVES Alfred domicilié au PONTET.

Le 20 Mai 1943, son frère BETRANCOURT Henri né le 29/10/1914 dans le Nord est arrêté à son tour par la police allemande et remis à des carabiniers italiens.

Les deux frères sont jugés par un Tribunal militaire italien à BREIL, acquittés et remis aux autorités françaises le 23 Juillet 1943 "

(A.D. Vaucluse 6W37)

27 Mai 1943 : « Arrestations opérées par les troupes d'occupation :

RAMIERE Charles né le 26/11/1909 à SAINT-ALEXANDRE. Cultivateur à Bollène la Croisière.

RAMIERE Marin frère du précédent, cultivateur à Mondragon ainsi que ses deux domestiques M.M. JAVELLE Henri et ROCHE Louis.

Ils ont été arrêtés avec la participation d'un groupe de miliciens dirigé par un dénommé GAUTHIER » (Rapport des R.G. A.D. Vaucluse).

Ils ont été emmenés à la prison d'Avignon, puis à celle d'Orange où ils étaient surveillés par des Italiens. Libérés quelques semaines plus tard. Le 11 Août 1943 Charles RAMIERE, son frère et JAVELLE sont à nouveau arrêtés et emprisonnés à la caserne du 7èmegénie à Avignon. Seul un maquisard dénommé " Petit Louis " réussit à s'enfuir. Charles RAMIERE ne reste que huit jours en prison mais son frère sera déporté.

30 Août 1943 : « Par arrêté du Préfet régional en date du 30 Août, le dénommé BARD Eugène, cultivateur à Sainte Cécile les Vignes, ancien militant communiste chez qui des tracts communistes avaient été trouvés au cours d'une perquisition, a été interné au centre de séjour surveillé de SAINT-SULPICE la POINTE. Par la suite déporté en Allemagne d'où il ne revint pas. »

(A.D Vaucluse)

8 Août 1943 : « Hier après-midi, vers 16h, la police allemande a procédé à une rafle en gare de La Croisière. La situation de nombreuses personnes a été examinée. Deux employés de la SNCF : BRUN et FARGE René ont été appréhendés, mais ils ont été relâchés aux premières heures de la matinée. Il ne m'a pas été possible de savoir les motifs de ces mesures de police. «

(Rapport du commissaire de police de Bollène A.D. Vaucluse 3W19)

René FARGE fut à nouveau arrêté le 11 mai 1944 et interné à la citadelle de Pont St Esprit.

11 Août 1943 : Nouvelle rafle de la police allemande à La Croisière. Nous en parlerons plus loin.

1er Novembre 1943 : « A 17h45, deux individus se sont présentés au restaurant de La Croisière à Bollène et ont abattu à coups de revolver M. BODIN Georges, tenancier de ce restaurant. Leur coup fait, ces deux individus se sont enfuis dans une voiture automobile… dans laquelle se trouvaient deux autres individus.

M. BODIN avait été arrêté par la police française il y a quelques mois, pour trafic de cartes d'identité au profit des réfractaires. Il venait juste d'être relâché.

(Rapport des R.G. A.D. Vaucluse 3W29)

4 Décembre 1943 : Arrestation à Bollène de Mme SCHMITT de nationalité américaine.

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11 Août 1943 : Opération contre les groupes F.T.P. du canton de Bollène

Ces groupes avaient à leur actif un nombre important d'actions de sabotage sur la voie ferrée et contre les pylônes électriques. Depuis plusieurs semaines les miliciens de Bollène multipliaient les rondes nocturnes et les surveillances pour tenter de les repérer et d'identifier leurs membres.

L'un d'eux était composé d'Henri SABATIER, Eugène BERTRAND, Louis DUGAS, dit « Loulou » et son cousin Léon DUGAS. Un autre était dirigé par Charles RAMIERE ancien conseiller municipal communiste.

Le 11 Août 1943, à l'aube, un fort détachement de SS accompagné de miliciens investissent le hameau de La Croisière. Toutes les issues sont barrées, la gare est occupée.

Le commissaire de police, dans son rapport au Préfet écrit :

« Hier après midi, des inspecteurs de la 9ème brigade de police de sûreté de Marseille et des dirigeants de la milice ont opéré dans le quartier de La Croisière. Le nommé RAMIERE Charles, cultivateur, aurait été arrêté, tandis que le nommé DUGAS Léon qui avait été appréhendé aurait réussi à prendre la fuite. Officiellement je n'ai pas été tenu au courant de ces opérations de police. »

(A.D. Vaucluse 3W19)

Nous avons un peu plus de détails avec le témoignage d'un résistant, Charles MONIER qui a vécu cette journée dramatique :

« Vers la mi-Août 1943, un détachement de SS épaulé par des miliciens locaux avec à leur tête le dénommé CRUON, investit le hameau de La Croisière.

Ils tentent d'abord d'arrêter Loulou DUGAS. Il est sept heures du matin. Celui-ci se rend à son travail à la gare. Arrivé au passage à niveau (qui n'existe plus aujourd'hui), un soldat allemand l'interpelle :

- Pouvez-vous me dire où habite M. Douga ?

Loulou a compris : on vient l'arrêter.

Il indique une fausse direction vers l'ouest alors qu'il habite à l'entrée du hameau mais du côté est.

Il se rend immédiatement chez lui pour avertir ses parents. Puis il s'évapore dans la campagne échappant ainsi à l'arrestation.

Toute la journée, les SS font régner la terreur dans le hameau. Les chiens rencontrés dans la rue sont abattus, les poulaillers sont pillés ainsi que plusieurs habitations.

Les habitants trop curieux qui sortent de chez eux pour savoir ce qui se passe sont pris comme otages et enfermés dans la gare.

Ce jour-là, Marcel (Eugène BERTRAND) vient d'Avignon, par le train, avec des tracts pour annoncer les victoires alliées en Italie. Comment le prévenir ? Ce sont Jean SCHAPPLER (jeune patriote alsacien réfugié à Bollène) et Mme VERGNE, épicière à La Croisière, qui vont s'en charger. Tous les deux le connaissent. Mme VERGNE prend une valise et se rend en gare comme si elle partait en voyage. Le train s'arrête, les SS surveillent. Marcel s'apprête à descendre. Jean lui fait un signe. Il a compris. Il se rassied. Mme VERGNE monte avec lui dans le compartiment et lui explique la situation. Ils descendront tous les deux en gare de Lapalud. Marcel est sauvé.

Dans l'après midi, une voiture automobile arrive, conduite par un allemand.

Elle prend la direction de la ferme de Charles RAMIERE qui est arrêté et emmené les bras attachés derrière le dos. Libéré deux mois plus tard, il rejoint un maquis de l'Ardèche avec Louis BOISSIN de Bollène.

Ayant assisté a cette arrestation et pensant que mon tour allait venir, je vais me réfugier dans une ferme voisine. La propriétaire, une vieille fille très croyante, vit toute seule. Elle accepte de me cacher dans une vieille étable. Elle connaît mes idées communistes et le risque qu'elle encourt. Elle n'a pas hésité.

De ma cachette, j'entends crépiter des coups de feu. L'angoisse me serre la gorge. Que se passe-t-il ? Je ne l'apprends qu'en fin de journée lorsque les SS se sont retirés.

Vers 16h, deux miliciens se sont dirigés vers la ferme de Léon DUGAS en bordure de la voie ferrée. En short, torse nu, il fait la sieste dans la cour. Léon ne perd pas son sang froid. Sa mère intervient en hurlant. Il lui fait un signe de la tête. Elle a compris.

Au moment où un milicien va lui passer les menottes, brusquement Léon bondit le renverse et détale à toute vitesse. Sa mère fait un croc en jambe au second milicien qui s'élançait à sa poursuite revolver au poing. Ce geste suffit pour permettre à Léon de prendre une certaine distance. Les miliciens tirent… tirent… . Le jeune patriote court… court…. Il franchit la ligne de chemin de fer sans être touché et disparaît dans la nature.

Jusqu'à la nuit les miliciens locaux battent la campagne pour retrouver Loulou et Léon. Mais en vain. Que sont devenus nos deux courageux camarades qui ont échappé de justesse à l'arrestation ?

En fin de journée, un paysan de Mondragon nous apprend qu'ils se cachent tous les deux dans un champ de maïs près de sa ferme. Léon est quasiment nu. Il faut lui apporter des habits. On convient d'un mot de reconnaissance :

" Mirza ".

Mme MONIER se charge de porter les vêtements. Elle part à vélo et arrive près du champ. Elle crie comme si elle appelait son chien : « Mirza, Mirza, mais où es-tu ? Viens ici sale bête ! »

Nos deux camarades apparaissent. Elle leur donne rendez-vous à minuit en un lieu bien déterminé.

Entre temps je prends contact avec Henri SABATIER et Jean SCHAPPLER qui n'ont pas été inquiétés. Henri les accueillera et les cachera dans sa ferme du Pont de la Pierre à LAMOTTE du Rhône où ils resteront jusqu'à ce qu'on puisse les envoyer dans un maquis.

Jean m'aidera à les conduire en prenant les plus grandes précautions car on ne sait pas si les miliciens ont abandonné leurs recherches.

A minuit nous sommes tous les deux allongés dans un fossé au lieu de rendez-vous.

Il fait un clair de lune magnifique qui inciterait plutôt à la rêverie et au plaisir de vivre. Pas question de rêver. La situation est trop grave.

Tout à coup deux silhouettes apparaissent avançant prudemment.

- Ce sont eux.

- Non, me souffle Jean, ils ont des grenades qui pendent à leurs ceintures. Ce sont les allemands !

Nos cœurs battent. Nos gorges se serrent de peur. Ils sont maintenant à deux mètres de nous, scrutant la nuit.

- C'est toi Léon ?

Nous nous embrassons de bon cœur.

Ce que nous avions pris pour des grenades à manche, c'était tout simplement des saucissons que ce brave paysan de Mondragon leur avait donnés et qu'ils avaient pendus à leur ceinture.

Nous arrivons sans encombre à la ferme SABATIER. Mais pour plus de sécurité, nos deux jeunes FTP et Henri dormiront et vivront dans un champ de maïs, ravitaillés par Mme SABATIER et ses filles.

La situation est très dangereuse. Les groupes FTP sont repérés. Charles RAMIERE est en prison. La gestapo et la milice vont sans aucun doute revenir pour tenter d'arrêter les autres.

Nous recevons l'ordre de nos supérieurs de passer immédiatement dans le "brouillard " c'est à dire de devenir des résistants clandestins. Il faut quitter la région.

Première étape, une ferme amie dans la montagne au-dessus de SAILLANS. Le propriétaire, Jean SIMONOT, est le fils d'un cheminot qui exerça ses fonctions à la gare de La Croisière de 1933 à 1938.

De là, Léon rejoindra un maquis du DIOIS et Loulou les maquis du Gard et des Cévennes où il gagnera les gallons de capitaine FTPF (homologué lieutenant FFI à la libération). Marcel (Eugène BERTRAND) rejoint la Résistance du Gard où il occupera des postes responsables très importants jusqu'à son assassinat par les Waffen SS en Juillet 1944.

Henri SABATIER est affecté auprès du colonel Fernand VIGNE, responsable des FTPF de la zone sud.

Mais avant de partir, il veut montrer à la population de Bollène que la Résistance n'est pas décapitée. Elle continue.

Quelques jours après ces évènements, Henri SABATIER, à deux heures du matin, détruit avec du " plastic " le locotracteur de la gare, utilisé par les Allemands, ainsi que la ligne téléphonique.

Quant à moi, je passe également dans la clandestinité avec mon épouse et ma petite fille de deux ans. Nous allons nous fixer à VALENCE où nous allons continuer le combat dans les organisations de Résistance de la Drôme. »

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Attentat contre la Légion française des combattants

En 1943, la résistance grandit de jour en jour. Les actions de sabotage et les attentats les plus divers se multiplient. La gestapo avec l'aide de la milice dresse des listes d'otages et de suspects préparant ainsi les mesures répressives que le canton de Bollène ne va pas tarder de connaître. Voici le rapport des Renseignements généraux du Vaucluse détenu aux Archives départementales :

" Dans la nuit du 10 au 11 Septembre 1943, vers 2h15 une bombe a éclaté devant le local de la Légion à Bollène rue Emile ZOLA. Les dégâts matériels provoqués tant à ce local qu'aux immeubles voisins sont assez importants, notamment en ce qui concerne les devantures dont toutes les vitres ont été brisées. Les auteurs sont inconnus, on n'a aucun indice, ni soupçons".

L'action a été réalisée semble-t-il par le groupe DIDERON du maquis MORVAN. En représailles, le 13 Septembre, le chef de la gestapo d'Avignon, accompagné de huit civils et six militaires, procède à huit arrestations. Le commissaire de police fait parvenir au Préfet le rapport ci-dessous :

(A.D Vaucluse 4W37)

" Les autorités allemandes disposaient d'une liste de personnes à arrêter. Huit d'entre elles ont pu être appréhendées. Neuf autres ne se trouvaient pas chez elles ou ont pu prendre la fuite. Il semble que les listes des personnes arrêtées ou recherchées ont été établies par des Français.

Les policiers allemands venus avec trois voitures, avaient réquisitionné un gendarme pour leur servir de guide.

Personnes arrêtées :

ROMBAUD André comptable

LESPINASSE Ernest bûcheron

BRUNEL Louis entrepreneur de maçonnerie

BIGNAN Louis ancien maire

MERIN Paul manœuvre d'usine

LACHAUX Emile percepteur

LAFFONT Ernest cultivateur

DUGAS Jules cultivateur

Personnes en fuite :

BOISSIN Louis bûcheron

VRAY Honoré manœuvre d'usine

FERRONI Fernand maçon

VERNET Frédéric cultivateur

PLANCHE Elie cultivateur

GOURJON Emile charron

POUZOL Louis ouvrier d'usine

NURY Gervais instituteur à Lapalud

Toutes les personnes arrêtées ou en fuite, à l'exception de M. BIGNAN ont été, soit communistes, soit sympathisants des partis de gauche.

Ces arrestations ont produit en ville une impression considérable ".

Le rapport est accompagné d'une note du Préfet :

" Ces arrestations ont vraisemblablement été effectuées à la suite des récents attentats commis à Bollène, localité qui semble être considérée par les autorités allemandes comme centre d'agitation terroriste ".

 

La population bollénoise, en grande majorité acquise à la Résistance, était d'autant plus indignée que les arrestations furent opérée avec la plus grande brutalité. M. Jules DUGAS de La Croisière, malade, fut arraché de son lit malgré les protestations de son épouse et littéralement jeté sur une camionnette où il retrouva ses compagnons d'infortune.

La camionnette fit une halte devant le restaurant BODIN situé au croisement des routes nationales. La fille Germaine, malgré le danger encouru, réussit à prendre clandestinement une photo d'une des fenêtres de l'établissement. Cette photo est un document précieux sur la première action répressive à Bollène des forces d'occupation.

Parmi les personnes arrêtées, cinq furent déportées en Allemagne : M.M. ROMBAUD André, LESPINASSE Ernest, LACHAUX Emile, LAFFONT Ernest et BRUNEL Louis. André ROMBAUD et Emile LACHAUX n'ont jamais eu la joie de revoir Bollène et leurs familles. Ils sont morts dans les sinistres camps de concentration nazis.

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Liste d'otages

A partir de 1943, l'occupant et les autorités de Vichy s'inquiètent des progrès de la Résistance.

Le maréchal Pétain parle " d'un mauvais vent qu'il sent se lever ".

Ils préparent des mesures répressives dans le but de terroriser la population de plus en plus hostile au régime de Vichy.

On trouve aux archives départementales du Vaucluse Dossier 4W9488 en date du 15 Novembre 1943, concernant le canton de Bollène, une liste intitulée :

Individus à arrêter préventivement en cas de troubles

(Inscription sur la liste SR )

BISCARAT Jean Bollène sympathisant communiste

BORELLY Emile Bollène sympathisant communiste ROBERT Ellen Bollène sympathisant communiste REMI Eugène Bollène sympathisant communiste

GOURJON Emile Bollène sympathisant communiste

LANNIC François (astreint à résidence) communiste

REYNAUD Bollène Louis Plombier

FERRONI Jean Bollène sympathisant communiste

PAILLON André Bollène ancien interné politique libéré

PLANCHE Elie Bollène ancien interné politique libéré

BONJORN Andres Bollène ancien interné politique libéré

MAÏELLA Sylvio Bollène suspect en cas de troubles

JOLIVET Roger Lapalud dangereux en cas de troubles

DELARQUE Louis Mondragon ancien interné libéré

BUFFIER Danton Lapalud (maire révoqué) suspect

BIEILLI Amédée Ste Cécile les Vignes suspect en cas de troubles

CHABERT Paul Ste Cécile les Vignes suspect en cas de troubles

COLLET Maurice Ste Cécile les Vignes suspect en cas de troubles

MATHIEU Noël Ste Cécile les Vignes suspect en cas de troubles

ZAFRILA Cosme Ste Cécile les Vignes suspect en cas de troubles

Une autre liste d'otages fut trouvée à la libération dans les archives de la Légion française des combattants. Elle fut éditée en affiches par la section de Bollène du Parti communiste.

(Voir document: Liste des otages)

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La milice de Pétain digne de la gestapo

Pour traquer les résistants et les Juifs, Hitler avait sa police, la gestapo, qui s'illustra par une répression sanguinaire et l'usage de la torture.

Début 1943, Pétain-Laval créent la milice, véritables équipes de tueurs, qui vont épauler la gestapo et les S.S. dans leurs opérations de répression, comme le 11 Août à La Croisière.

La milice du Vaucluse s'est constituée le 28 Février au cinéma Palace d'Avignon. Le chef départemental Max KNIPPING et le chef DEGAND, collaborateur immédiat de DARNAND, chef national, participent à l'assemblée.

Comme dans de nombreuses villes du département, la milice est créée à Bollène, avec à sa tête, le dénommé CRUON et quelques habitants de la commune, dont le facteur qui dessert le quartier de La Croisière. Celui-ci est bien placé pour intercepter les lettres des suspects. Les miliciens BOYER et KHUNING ont participé avec des miliciens locaux, aux différentes opérations qui ont eu lieu à Bollène et dans la région en 1943.

Des membres du P.P.F (Parti Populaire Français de DORIOT), parti fasciste autorisé, collaborent activement avec la milice. Dans une réunion du P.P.F, on cite en exemple le Dr Pierre BONNEFOY qui, à Bollène, revolver au poing, a procédé à l'arrestation d'un habitant de cette localité. Le Dr BONNEFOY devient chef départemental de la milice, puis il se porte volontaire pour les Waffen SS.

(source : A.D Vaucluse rapport des R.G.)

Dans le recrutement de ses membres la milice est peu regardante.

C'est ainsi que le dossier 3W29 des A.D. du Vaucluse cite un dénommé

" SAUVET membre de la milice du Gard, qui a fait l'objet en 1932 d'un mandat d'arrêt pour vol et il est titulaire d'une condamnation de trois mois de prison pour coups et blessures ".

Certains miliciens font partie du service de sûreté allemand. Dans le dossier 6W37 des A.D. un rapport en date du 8 Juin 1944 indique :

" Sous la menace de leurs armes le 18/12/1943, cinq individus du service de sûreté allemand se présentaient chez M. GIRARD Ernest à AUBIGNAN et se faisaient remettre 155 000 F en billets de banque, une certaine quantité de pièces d'or, des bijoux, des titres au porteur et différents objets. Le montant du vol est estimé à environ 300 000 F.

Il s'agit de :

ALESSANDRI Paul, né à Toulon, condamné à 5 ans de prison, puis à 5 ans de travaux forcés.

CABAGNO Jean Baptiste, né à Marseille, 8 mois de prison pour escroquerie.

QUEUDANE Roger, né à Paris, plusieurs fois condamné, dont un an de prison pour vol ".

Ces individus recrutés dans la pègre étaient tout désignés pour devenir des tueurs de patriotes.

La milice collabore activement pour la recherche des résistants clandestins et des hommes politiques hostiles à Vichy.

C'est ainsi qu'en Février 1943, la présence de Maurice THOREZ est signalée à Bollène. Des recherches sont effectuées sur ordre du commissaire de police qui finalement dans son rapport conclut : « les recherches entreprises en vue de découvrir les traces de son séjour ou de son passage dans ma localité n'ont donné qu'un résultat négatif ».

Un autre rapport est également négatif au sujet de recherches concernant LAUDON Georges, BONNET Marius d'Avignon et MARIAUD Fernand de l'Isle S/ Sorgues, évadés le 7 Février de la maison d'arrêt de Toulon.

(A.D. Vaucluse 3W64)

La police dresse des listes d'individus prétendus dangereux pour la Défense nationale, libérés d'un centre de séjour surveillé. Parmi une trentaine de Vauclusiens on y trouve trois habitants du canton :

DELARQUE Louis de Mondragon, interné à CHABANET du 21-5-40 au

21-6-40.

PAILLON André de Bollène, interné à CHABANET puis à ORAISON du

20-5-40 au 31-12-41.

PLANCHE Elie de Bollène interné à CHABANET du 20-5-40 au 22-4-42.

(A.D. Vaucluse 3W63)

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Les collaborateurs seront châtiés…

Dans son rapport du 20 Décembre 1943, le commissaire de police signale la distribution à Bollène d'un tract du comité régional du Front National pour la libération de la France. Le tract rappelle « le décret du 7 Septembre 1793 contre ceux qui aideraient les envahisseurs. Les patriotes qui, aujourd'hui comme en l'an II, luttent courageusement contre l'envahisseur, ne peuvent tolérer que certains Français fassent le jeu de l'ennemi en lui apportant une aide quelconque.

Français, dès maintenant il faut repérer tous ceux dont l'activité sert les intérêts de l'ennemi… Les collaborateurs seront châtiés proportionnellement aux services rendus à l'ennemi, justice sera faite ».

(Source : A.D. Vaucluse)

Pour ceux ayant dénoncé et fait arrêter des patriotes ce sera la mort.

Le 4 Août 1943 à 23h, le milicien Fernand BOUCHON est exécuté par la Résistance. Voici le rapport du commissaire de police :

« BOUCHON Fernand, exploitant forestier, demeurant à Bollène quartier du PUY, milicien, a été abattu d'un coup de revolver au ventre au moment où il regagnait son domicile. Deux inspecteurs spécialisés de Marseille enquêtent. Pour l'instant l'enquête n'a donné aucun élément appréciable.

La population commente l'attentat. Avec un manque d'humanité évident, elle manifeste son contentement. Elle n'a jamais caché qu'elle considérait la milice comme une police illégale.

Presque tout le monde est d'accord pour conclure que BOUCHON est « sa propre victime » car il parlait trop et se flattait d'avoir provoqué maintes arrestations »

(A.D. Vaucluse 3W19)

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Extraits du livre d'Aimé VIELZEUF :

« Au temps des longues nuits »

« Un agent administratif de Vichy pour les cantons de BAGNOLS / CEZE et PONT SAINT ESPRIT, inspecteur de la milice, Georges GUEZ et son père, directeur du cinéma REX à PONT St Esprit avait établi une liste comportant près de 150 noms. En Octobre 1943, le comité A.S. de Pont St Esprit ayant eu la preuve de leur trahison, avait jugé par contumace et condamné à mort les deux hommes. Il y avait au dossier une lettre du fils GUEZ au Préfet CHIAPPE, dans laquelle il sollicitait, en récompense des services rendus à Vichy, une place de sous-Préfet.

Le 8 Novembre 1943, le père et le fils ont été exécutés dans le hall de leur propre cinéma par l'équipe FTP de LAMOTTE DU RHONE ».

Henri SABATIER faisait partie de cette équipe.

Son frère Georges témoigne en ces termes de la conduite de l'opération :

«  C'est à LAMOTTE DU RHONE, fin Octobre 1943, au cours d'une rencontre au plus haut niveau de l'Etat Major de la zone sud que la décision est prise. L'action sera menée par un groupe d'hommes et de femmes capables d'affronter tous les dangers. Elle est fixée au 8 Novembre, préparée

avec la plus grande prudence car les GUEZ étaient fortement protégés par les SS et la police de Vichy.

Je me souviens avoir plusieurs fois traversé le pont du Rhône afin de reconnaître les lieux avec ceux habillés en tenue de travail qui allaient mener une action d'une audace exceptionnelle. Ce soir-là, on jouait au cinéma « 25 ans de bonheur ». Toutes les voies de replis avaient été maîtrisées. Une équipe fortement armée et entraînée au combat protégeait la fuite. Et puis deux hommes… Ils étaient restés plusieurs jours à LAMOTTE.Le 8 au soir tout le monde en place. Chacun de ces deux hommes disposaient de deux pistolets 7/65 dont le fonctionnement avait fait l'objet de la plus grande attention. Ils s'avancent dans le couloir du cinéma, prennent leur billet d'entrée, se dirigent vers le bar, par-dessus, chapeau, gants à la main. Au bar seulement les maîtres des lieux. La musique couvre les discussions. Ils commandent à boire. Au moment où ils vont payer, quatre à cinq balles à bout portant. Les deux traîtres ont payé leurs crimes.

C'est dans la salle la fuite en avant des SS. Les miliciens essaient de réagir, mais c'est trop tard. Nos deux camarades sont déjà dans l'entrée. Les fusils mitrailleurs de l'équipe de protection arrosent la façade. Deux voitures démarrent en trombe. Un fusil mitrailleur dans chaque voiture protège la fuite. De leur côté ceux qui protègent l'action sont déjà aux quais du Rhône. Plusieurs bateliers les attendent. Le Rhône est en crue. Ils vont atterrir au quartier de LAMIA. Les deux voitures gagnent le nord du Gard. Les cheminots avaient assuré la sécurité, les passages à niveau ouverts.

Nos deux camarades trouvèrent la mort, plus tard, au cours d'actions d'une dimension identique ».

A la Libération, des miliciens bollénois furent arrêtés, jugés, condamnés à mort et fusillés.

Leur chef CRUON réussit à s'enfuir. Il ne fut jamais retrouvé.

Le 17 Septembre 1943, MORELLI, huissier à Valréas, membre de la milice, a été abattu à coups de revolver.

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Les juifs persécutés, pourchassés et déportés

 

L’antisémitisme virulent du gouvernement de Vichy se fait également sentir dans le Vaucluse où on dénombre 1 500 juifs dont 450 environ de nationalité étrangère.

 

Dans son rapport du 26 août 1942, le commissaire de police de Bollène rend compte « d’une rafle au cours de laquelle 9 polonais juifs ont été dirigés sur le camp des Milles (Bouches du Rhône) ». Il ajoute : « la population s’émeut des arrestations opérées dans les milieux israélites ».

 

Le commissaire spécial des renseignements généraux note le 22 septembre 1943 que « la population du Vaucluse leur marque une certaine sympathie et déplore ouvertement les mesures dont ils font l’objet » (AD Vaucluse 3W29)

Mme MONIER de la Croisière a hébergé durant plusieurs mois en 1941 un journaliste juif Henri CRESPI.

 

Des résistants s’efforcent de leur procurer des fausses cartes d’identité pour échapper aux recherches des miliciens et à la déportation. La famille ICKOVICZ a caché le docteur Yvonne ROSENBAUM.

 

Les milieux catholiques de Bollène sont indignés par les mesures frappant les juifs. Au cours d’un sermon en l’église paroissiale un prêtre se fait l’avocat des israélites.

 

Le 27 octobre 1941, un placard anti-juif est apposé sur la porte de la doctoresse Marianne BASCH.

« Le 1er décembre 1943, la police allemande a effectué deux perquisitions aux domiciles de la doctoresse BASCH et de la nommée ROSEMBAUM qui demeurait chez Melle EYNARD, Bd Victor Hugo. Elles auraient réussi à prendre la fuite…La population est vivement impressionnée par ces opérations ».

(rapport du commissaire de police AD Vaucluse)

Mme BASCH trouva refuge dans des familles bollénoises notamment M. Robert BUFFIERE, M. Louis BIGNAN, ancien maire, M. FARJON, puis à St Paul Trois Châteaux chez M. FLANDRIN, enfin à CLANSAYES chez Mme FROMENT, en attendant de pouvoir se réfugier en Suisse avec son fils André âgé de 10 ans.

Ce fut Melle Germaine BODIN de la Croisière qui se chargea de lui procurer de fausses pièces d’identité pour elle et son fils.

Ses beaux-parents, le professeur Victor BASCH et sa femme furent assassinés par les nazis.

Le professeur Gilbert DREYFUS, réfugié à Bollène, n’eut pas la même chance que Mme BASCH. Arrêté quelques temps plus tard dans une autre ville et déporté à MATHAUSEN où il resta un an.

Le 2 mars 1944, ce fut l’arrestation de la famille ROSENBERG qui était venue d’EPINAL se réfugier à Bollène au château de GOURDON.

Un rapport de police en parle en ces termes :

« Dans la nuit du 1er au 2 mars 1944 et dans la journée du 2 mars une quinzaine d’agents de la police allemande ont opéré des perquisitions à LA MOTTE du Rhône et Bollène.

Au château de GOURDON (Bollène) M. ROSENBERG Slzama, sa fille Marceline, 16 ans, Mlles MELMAN Marie 20 ans et Suzanne, 19 ans, et M. FIATER ont été arrêtés. Du linge, du ravitaillement et des objets de valeur ont été emportés. Dans l’habitation du maître valet, du linge, un poste de T.S.F. et 20 000 F. ont été dérobés.

Au domaine des BOUFFES, M. VALCKE exploitant forestier a été arrêté et un poste de T.S.F. enlevé »

(A.D. Vaucluse 6W37)

 

Une des filles ROSENBERG, Jacqueline raconte cette soirée tragique du 1er mars :

 

« Lors de l’arrestation de ma famille au château de GOURDON, ni mon petit frère Michel qui n’avait pas 7 ans, ni moi qui n’en avait pas 12, n’étions là. Nos parents qui n’étaient pas très rassurés depuis que les allemands avaient envahi la zone libre, nous avaient mis par précaution en pension chez Mme TOURATIER à St Pierre. C’est grâce à elle que nous n’avons pas été arrêtés.

Voici ce que ma sœur Henriette et ma mère qui avaient réussi à se sauver m’ont raconté :

Vers minuit, alors que tout le monde venait de se coucher, des grands coups ont été frappés au portail de bois qui fermait la cour. Notre père est allé voir. C’étaient les allemands. Il a appelé tout le monde afin de se sauver par la porte situé au fond du parc. Cette porte n’était connue que des proches vivant ou travaillant au château. Malheureusement, nous avions sûrement été dénoncés par des gens très proches, car les allemands attendaient derrière cette porte. Notre père qui était parti le premier, a été arrêté par les Allemands et ensemble ils sont revenus au château. Ma mère et ma sœur Henriette qui suivaient derrière, se sont couchées par terre et se sont ainsi trouvées cachées par les plantes ce qui les a sauvées. Notre future belle-sœur et sa sœur qui suivaient derrière ont été également arrêtes ainsi que notre sœur Marceline ».

M. ROSENBERG, sa fille Marceline et ses deux amies Marie et Suzanne MELMAN seront déportés au camp d’extermination d’AUCHWITZ. Seules les trois femmes reviendront en très mauvaise santé.

Le même jour, la Gestapo, aidée de miliciens bollénois, arrête une autre famille juive réfugiée à Bollène, la famille SAPIR. Le père mourra en déportation.

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Le maquis d’UCHAUX dit la villa rose

 

Les premiers maquis se constituèrent dans la région courant 1943 pour accueillir les réfractaires au S.T.O qui refusaient de partir travailler en Allemagne. Ils furent nombreux tout autour de Bollène, dans les régions montagneuses de l’Ardèche, des Cévennes et des Baronnies. Les plus proches étaient ceux de la LANCE et du VENTOUX. Le premier organisé par les FTPF, le second par l’A.S. (Armée Secrète Gaulliste).

Début 1944, un maquis s’installe entre Uchaux et Mondragon, au quartier « POUPAYE » en un lieu très boisé, dans une villa appelée « La Villa Rose ». Cette maison, aux murs roses, bien camouflée dans les bois, allait devenir le lieu de cache d’un nombre important de jeunes maquisards. Il y en eut jusqu’à une trentaine. Leur chef s’appelait LAUDON.

Peu à peu, ces jeunes furent armés par les organisations de la Résistance. Le jour ils recevaient une formation et un entraînement militaire. La nuit, ils allaient accomplir des coups de main et des actes de sabotage notamment sur la voie ferrée qui passait à proximité. La nuit, une femme venait à bicyclette leur livrer des explosifs. Nourrir tous ces jeunes maquisards était un problème. Ils recevaient du ravitaillement de paysans de Mondragon et de la région, notamment de MM. Marius RIQUE, Célestin FABRE, M et Mme PAILLON, Mme RAMIERE et sa fille.

Peu de temps avant la Libération, le maquis de « La Villa Rose » fut repéré par les Allemands. Le chef donna l’ordre de quitter les lieux immédiatement. Les maquisards évitant le combat avec des forces nettement supérieures en nombre et en armements, se replièrent en d’autres lieux plus sûrs.

Un Jeune bollénois René FAVRO, a vécu dans ce maquis. Voici ce qu’il nous a dit :

« Je suis entré dans la résistance en mars 1944 dans un réseau du M.U.R. (Mouvements Unis de Résistance) du canton de Bollène. J’ai hébergé avec mes parents une quinzaine de résistants dans notre « villa », quartier de « POUPAYE), proche de MONDRAGON. Mai-juin 1944, actions de sabotage de la voie ferrée et des lignes téléphoniques de la base aérienne d’ORANGE.

Après menace d’intervention des SS contre le maquis, repli du groupe dans une ferme des îles du Rhône. Recherche de déserteurs allemands cachés dans la montagne, barrages et contrôle sur toutes les routes du canton de Bollène d’août à la libération ».

Un long rapport de la gendarmerie de SORGUES, en date du 4 mars 1944, parle d’un maquis se trouvant à la limite de Bollène et de Mondragon. Il semble que ce soit le même maquis. Voici des extraits de ce rapport :

« L’arrestation en flagrant délit terroriste de WADMAR Etienne par la gendarmerie de SORGUES…

Un hangar qui était le repaire présumé de la bande fut cerné. A l’intérieur aucun individu…Présence d’une voiture Citroën renfermant des armes, de nombreux tracts communistes, une enveloppe portant l’adresse de Melle MONTFROND Jeannine, rue MAULAN AU GARIGOU, Sète, une pochette avec l’adresse de M. DANIEL Albert, Suze la Rousse (Drôme), deux états financiers en blanc du groupe FAÏTTA. L’individu arrêté alors qu’il s’enfuyait a déclaré se nommer WADMAR Etienne, 20 ans, né à CARVIN (Pas de Calais). Au cours de son interrogatoire, il déclara : « …mes deux compagnons en fuite surnommés l’un Pied de poule et l’autre Louis…

Nous avons entreposé dans le hangar la voiture automobile que nous avions volée le 29 février sur la route entre SERIGNAN ET STE CECILE LES VIGNES. Cette voiture appartenait à M. RAMADE René, propriétaire à NYONS. Un autre camarade prénommé Jean se trouvait avec nous. Nous nous sommes enfuis en direction de Bollène pour rejoindre notre camp qui se trouvait à la limite de Bollène et de Mondragon, sous l’appellation de groupe FAÏTTA dont faisaient partie 8 camarades sous les ordres d’un surnommé SPADA. Notre camp a été dissout le 1er mars 1944. MARION, Pied de Poule, Louis et moi avons pris la voiture et sommes venus à SORGUES pendant que les autres s’éparpillaient dans la nature.

Le ravitaillement du camp était assuré par un surnommé Georges. Il se déplaçait toujours à bicyclette…

Les tracts et les armes nous ont été remis par Georges…

Avant d’appartenir au camp du groupe FAÏTTA, je faisais partie de celui de SEDERON (Drôme) qui était un camp gaulliste… »

Dans la traction avant, a été trouvée une note jointe au rapport de gendarmerie et libellée en ces termes :

« ARAMON, le 22 février 1944, je te fais parvenir quelques vignettes de pain. Il me faut sans faute un vélo…tu l’amèneras mercredi prochain, 1er mars en gare de Bollène la Croisière…Pour samedi, tu fera descendre le gars qui doit venir ici avec ses affaires, je ne me rappelle plus son nom, c’est le plus âgé… »

Signature illisible

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De nombreux jeunes gagnent les maquis de la région

 

La plupart sont des réfractaires au S.T.O.

Ils vont devenir des combattants volontaires et participeront aux combats de la Libération.

Dans le canton, près d’une centaine a été recensée. Une quinzaine dans le groupe FTPF, Yves LARIVEN du nom de ce jeune héros de la Résistance, lâchement assassiné par la milice à la prison CHAVE de Marseille. Une vingtaine au maquis MORVAN. D’autres au maquis VENTOUX. Certains rejoignent des maquis éloignés dans la Drôme, l’Ardèche, les Cévennes, le Gard et jusque dans l’Allier.

Jean SCARDICCHIO, domicilié à Bollène, contribuera à l’organisation des maquis dans le DIOIS, LE NYONSAIS et les CEVENNES, participant à de nombreux coups de main armés. A la libération, il revint à Bollène avec le grade de capitaine FTPF homologué lieutenant FFI.

 

En arrivant dans un maquis F.T.P., le jeune réfractaire était immédiatement formé et entraîné pour la guérilla, l’utilisation d’explosifs, de la mitraillette et des grenades, notamment des fameuses « gammons » qui semaient la terreur parmi les nazis. Une discipline librement consentie et une très grande fraternité étaient la règle sur la base d’un serment appelé « le serment du F.T.P. »

Les chefs étaient les premiers combattants déjà aguerris et s’étant distingués par leur courage et leur audace. La plupart étaient des ouvriers, des paysans, des instituteurs, des étudiants. Très peu de militaires de carrière. Ceux ci qui se retrouvent surtout dans les maquis de l’A.S. (Armée Secrète Gaulliste)

Jean MOUTET d’AVIGNON, commandant de la compagnie FTPF « VAILLANT COUTURIER » a pris pour devise « Mieux vaut mourir debout que vivre à genoux ». il trouva la mort dans un engagement vers BUIS les BARONNIES.

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Des immigrés aux côtés des patriotes français

 

Des Bollénois d’origine arménienne rejoignent également la Résistance.

Arakel ARAKELIAN fut arrêté et déporté en Allemagne. Jean BARSAMIAN fit le sacrifice de sa vie pour la libération de GRIGNAN. Jacques BARSAMIAN fut interné à la citadelle de Pont St Esprit.

Citons également Georges TCHOLAKIAN et Effren RICHNOUDIAN.

Des républicains espagnols, des immigrés italiens comme Angelo De PICCOLI qui en 1943 refuse de faire son service militaire dans l’armée italienne et rejoint le camp des italiens n° 13 au maquis de la LANCE.

Affecté au bataillon FTPF MORVAN, il participe à de nombreux combats pour la libération de NYONS et la reconquête de la base aérienne d’ORANGE.

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La dure vie des maquis

 

L’hiver 1943-1944 fut particulièrement dur pour les jeunes des maquis. Hébergés le plus souvent dans de vieilles fermes de montagne ou parfois dans de simples cabanes de bûcherons, couchant à même le sol. Ne pouvant éclairer du feu pour se chauffer par crainte de se faire repérer. Mal nourris, mal habillés, mal chaussés, toujours sur le qui-vive, pourchassés par les S.S.et la milice, obligés de se déplacer sans cesse dans la montagne pour éviter l’encerclement par les troupes de répression, ils ont tenu héroïquement jusqu’à la Libération. Beaucoup ont trouvé la mort dans les combats. Certains ont contracté de graves maladies et sont morts jeunes, comme le FTP, Loulou DUGAS.

Isolés au début, les clandestins obtiennent rapidement un soutien populaire sans lequel ils n’auraient pu ni accroître leurs forces, ni même survivre.

Ils l’ont eu, malgré la propagande de Vichy qui les présentait comme des « bandits » et les appelait « Terroristes ». De nombreux paysans de Bollène, de Lapalud, de Mondragon, de Lamotte du Rhône ont ravitaillé les maquis de la région.

Etant dans l’illégalité la plus totale, sans tickets d’alimentation, sans bons de vêtement et de chaussure, sans moyens de transport, pour leurs déplacements dans leurs actions contre l’armée allemande, ils furent dans l’obligation d’accomplir ce que Vichy appelait « des actes de terrorisme ».

Comment la population jugeait-elle ces actes ?

Un rapport du commissaire principal des renseignements généraux en date du 28 février 1944 constate :

« Les évènements qui retiennent tout particulièrement l’attention de la population sont sans conteste les actes de terrorisme qui sont perpétrés journellement dans le Vaucluse.

Ceux-ci sont commentés de façons très différentes selon les milieux. Chez les paysans, on n’enregistre pas une hostilité sérieuse contre les bandes de réfractaires. Il est même paradoxal de relever….que les paysans approuvent pour la plupart, les opérations menées par les réfractaires dans le département. Ils admettent….que tous les jeunes qui vivent durement dans les montagnes…doivent bien se ravitailler en recourant à des méthodes souvent brutales dans l’impossibilité où ils se trouvent de subvenir légalement à leurs besoins.

Les ouvriers et les commerçants ont devant le « terrorisme » une opinion qui s’apparente à celle des masses paysannes ».

(A.D. Vaucluse)

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Rendons à César ce qui appartient à César…

Le 22 Décembre 1943, les F.T.P.F. de la vallée de la Drôme réalisent une action importante contre un convoi allemand qui, parti de Valence, se dirige vers Die. Aux environs du village de VERCHENY, ils réussissent à faire dérailler le train sur un pont qui enjambe la rivière Drôme. Plusieurs wagons plongent dans le lit du torrent. Près de 200 nazis trouvent la mort.

C'est un ancien Bollénois, Alfred SIMONOT, chef de gare à AOUSTE s/ SYE qui a eu l'initiative de cette action et qui a fourni les renseignements au groupe FTP de VERCHENY. M. SIMONOT a été employé à la gare de Bollène La Croisière de 1933 à 1939. Le jeune Bollénois FTP Léon DUGAS a également participé à cette action.

Nous avons pu retrouver une lettre adressée à M. SIMONOT par M. Jean SOSSO de Paris, dans la Résistance colonel FFI GUILLEMOT, ancien commissaire aux opérations militaires des Francs Tireurs et Partisans Français pour la zone sud de la France.

Voici quelques extraits de cette lettre qui sont un témoignage précieux sur une action importante menée par les FTP Drômois et à laquelle deux Bollénois ont participé.

«  Paris le 17 Février 1949

Bien cher Monsieur SIMONOT

Il aura fallu la tentative d'un journal lyonnais, de falsifier un point de l'histoire de la Résistance, et qui me tient à cœur, pour qu'après tant d'années, je me mette en rapport avec vous… Oui, mille fois oui, ce sont les FTP qui ont agi et non une autre organisation. J'ai donc téléphoné à M. PELOUX qui est maintenant chef de gare à VIF (Isère). Mais ici il s'est produit un quiproquo. C'est à vous que je croyais téléphoner. Nous avons bien mis quelques minutes avant de nous comprendre, et enfin c'est lui qui m'a mis sur la voie : le fameux jour où un chef de gare de VERCHENY interpella patriotiquement la voiture qui passait sur la route contenant le docteur HILAIRE (responsable local des FTP) et son patient, le colonel GUILLEMOT, ce chef de gare n'était pas PELOUX, en congé d'un jour, mais bien SIMONOT qui faisait l'intérim. Tout s'éclairait donc, et on pouvait rendre à César ce qui appartient à César. C'était là un premier point élucidé. Le second point que PELOUX confirma catégoriquement c'est que Résistance-Fer n'était pour rien dans l'affaire de VERCHENY à l'encontre de ce que le Progrès de Lyon a affirmé. Naturellement PELOUX fait remarquer que l'action n'a pas été réalisée en dehors de l'aide de cheminots. Je le lui accordai d'autant plus volontiers que je sais fort bien que celui qui a été à l'origine de toute l'affaire, et qui devrait à ce titre dejà avoir reçu une décoration, est le cheminot SIMONOT qui a fait le nécessaire, en plus, pour fournir à notre groupe de F.T.P. de VERCHENY le matériel pour riper les rails de si magistrale façon… Une action réussie au delà de toute espérance tue d'un seul coup plus de 200 boches, en estropie plusieurs centaines d'autres…

Mon cher SIMONOT, combien je regrette d'être si loin de vous en ces circonstances où il s'agit pour nous de faire respecter la mémoire de ceux de nos amis de VERCHENY et du docteur HILAIRE qui ne sont plus…

Car il faut que calmement mais fermement, nous remettions la vérité sur pied…

Jean SOSSO

Colonel GUILLEMOT »

N.B. M. Alfred SIMONOT n'a jamais reçu de décoration pour son acte courageux… il ne l'a d'ailleurs jamais demandée, comme bien d'autres héroïques Résistants.

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Des actions qualifiées de "terrorisme"

 

Des équipes spéciales de résistants mènent des actions diverses pour ravitailler les maquis : récupération de cartes d’alimentation dans les mairies et de tampons pour la fabrication de fausses cartes d’identité, de tabac, de vêtements, de vivres, de véhicules et même d’argent dans les banques et les bureaux de poste.

 

Toutes ces actions étaient minutieusement contrôlées par les chefs des organisations de résistance. La population de Bollène et du canton les comprenait et les admettait. Nous avons pu trouver aux Archives Départementales des rapports de police relatant quelques unes de ces opérations dites « terroristes », pour le Nord vaucluse.

 

23 JANVIER 1943 :

« Cambriolage du bureau de ravitaillement de la Mairie de Bollène. Aucun tampon dérobé mais 3 000 cartes individuelles d’alimentation ou coupons semestriels emportés ».

 

2 NOVEMBRE 1943 :

« Dans la nuit, des individus non encore identifiés, se sont introduits dans la Mairie de Mondragon et ont dérobé les objets et titres de rationnement ci-après :

Deux cachets « Mairie de Mondragon », un cachet « Légalisation de signature », un cachet « Président de la délégation spéciale », un cachet « Vaucluse ».

Une certaine quantité de cartes individuelles d’alimentation. Un nombre assez élevé de tickets de sucre, de pâte, de matières grasses, de fromage, de pommes de terre. Des cartes de lait concentré sucré et non sucré. Des cartes de chaussures et des bons d’achat de vêtements ».

La plupart des opérations dans les mairies étaient faites avec la complicité d’employés municipaux, qui renseignaient les résistants sur la date d’arrivée des cartes d’alimentation.

 

10 FEVRIER 1944 :

« La recette buraliste de Mondragon a été attaquée vers 16h15 par trois individus armés de mitraillettes. Ils se sont fait remettre 20 Kg de tabac ».

 

18 FEVRIER 1944 :

« Vers 9h, sur la route nationale n° 94, au quartier du Pont du Rhône à Lamotte du Rhône, un camion a été arrêté par douze individus armés de mitraillettes. Les deux occupants du camion ont été emmenés en voiture, les yeux bandés, et ont été retenus toute la journée dans un bois, puis ramenés vers 17h30 dans un restaurant à La Croisière, commune de Bollène. Quatre des agresseurs étaient avec eux, les huit autres sont partis avec le camion. »

 

28 FEVRIER 1944 :

« Vers 20h30, quinze individus armés et masqués se sont présentés aux chantiers de jeunesse d’Orange. Ils ont emporté une certaine quantité d’effets d’habillement. »

 

28 JUILLET 1944 :

« Vers 9h30, trois individus armés s’intitulant « Résistance », pénètrent dans le bureau de poste de Lamotte du Rhône. Sous la menace de leurs armes, ils demandent au receveur des renseignements sur la Mairie qui paraît être le but de leur attaque, mais n’obtiennent aucune réponse. Le bureau est fouillé. Malgré sa résistance, le receveur doit remettre l’argent du tiroir caisse. Il reçoit en échange un ordre de réquisition signé PORTHOS »

 

Le commissaire spécial des R.G. du Vaucluse signale dans son rapport les faits suivants :

 

« Le 15 novembre 1943, deux inconnus masqués et armés ont emporté une quantité relativement importante de tabac, chez M. GIFLET débit de tabac, cours du BERTHEUIL à VALREAS.

Le 24 novembre, M. NIEL, maire de VALREAS, a trouvé dans sa boîte aux lettres une enveloppe contenant 3 000F à remettre à M. GIFLET pour le dédommager « des moyens employés lors de l’agression armée, ayant occasionné la saisie de son tabac pour les patriotes ».

(A.D. Vaucluse 3W29)

 

Non, vraiment, les maquisards ne sont pas des voyous, comme la propagande vichyste tente de le faire croire.

 

3 JUIN 1944 :

« Quatre individus s’emparent de 57 150 F à la Société Marseillaise de crédit de Bollène ».

 

12 JUILLET 1944 :

« Vers 20h30, une cinquantaine d’individus armés se sont présentés à la gendarmerie de Ste Cécile les Vignes. En l’absence du personnel replié, ils se sont emparés d’une bicyclette et de victuailles ».

 

 

 

Les maquisards sont amenés parfois à opérer des actions de saisie de vivre et de véhicules, dont ils ont absolument besoin, dans des fermes ou des garages de la région.

 

Dans ces cas-là, ils s’attaquent à des collaborateurs notoires ou à des trafiquants du marché noir qui s’enrichissent scandaleusement tandis que la grande masse des habitants des villes souffrent du manque de ravitaillement.

 

Voici quelques-unes de ces actions mentionnées dans les rapports de police :

 

FEVRIER 1944 :

« Dans la nuit du 10 au 11, une automobile Peugeot 202 est enlevée dans le garage de M. O…, industriel à Mondragon.

 

20 FEVRIER 1944 :

« L’habitation de M. M… à Lagarde Paréol est attaquée par une dizaine d’individus armés qui emportent diverses victuailles ».

 

29 FEVRIER 1944 :

« Vers 16h, M. R…, épicier en gros, a été arrêté entre Sérignan et Ste Cécile les Vignes par cinq individus armés. Ils ont obligé M. R… à leur remettre son véhicule ».

Cette action a été réalisée par deux maquisards du maquis MORVAN. « Ah ! c’est le maquis, eh bien vous n’avez qu’à tout prendre » dit le chauffeur qui descend suivi de son passager.

 

 

20 MARS 1944 :

« une dizaine d’individus armés se sont présentés chez M. V…à RICHERENCHES et se sont emparés de trois porcs, de diverses provisions, d’une camionnette et d’une bicyclette ».

 

21 MARS 1944 :

« Cinq individus armés ont pillé la ferme B… à PIOLENC ».

 

MAI 1944 :

« Le 15 mai 1944, vers 17h30, une douzaine d’individus armés attaquent le garage B… à Valréas et emportent 700 litres d’essence.

Le même jour, vers 18h, quatre individus s’emparent de la voiture automobile de M. T…, agent d’assurances à Valréas ».

 

23 JUILLET 1944 :

« Une cinquantaine d’individus armés se sont emparés des camionnettes de MM C.V… , F.L… , C.M….et de chaussures au magasin de M. K… à Ste Cécile les Vignes ».

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La marche vers la Libération

 

A partir de janvier 1944, la Résistance se renforce de jour en jour. Des actions armées contre l’occupant prennent une très grande ampleur. Une véritable guérilla très efficace se développe. Dans un rapport, les R.G. signalent en mars, dans l’ensemble du Vaucluse, une trentaine d’actions de groupes armés, « sabotages sur la voie ferrée, récupération de tickets d’alimentation dans les mairies, de tabac dans les recettes buralistes, de denrées alimentaires, des véhicules (camions et autos), exécution de deux personnes (sans doute des collaborateurs), etc… »

 

Le Nord Vaucluse y prend toute sa part.

 

Parallèlement, les actions répressives se multiplient contre les Résistants pour tenter d’enrayer l’élan patriotique de la grande majorité de la population.

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Les parachutages d’armes

 

Les groupes F.T.P et les maquis du Nord Vaucluse et du Sud de la Drôme manquent cruellement d’armes. Les combattants sont nombreux mais l’armement est dérisoire. Ils ont bénéficié de très peu de parachutages.

 

D’après Charles TILLON, dirigeant national des F.T.P.F., « « les parachutages…n’auront été pour les F.T.P.F. qu’un appoint négligeable jusqu’à la libération, sauf en quelques circonstances exceptionnelles. On jugera de l’aide en armement fournie aux F.T.P.F. en disant que sur des centaines de parachutages pratiqués en France, six furent officiellement accordés aux F.T.P.F. qui pourtant grouperont en août 1944, 50% des Forces Françaises de l’Intérieur ».

(Cité par l’historien Alain GUERIN, dans son livre « Chronique de la Résistance » - Page 1525)

 

Les groupes F.T.P.F. de Bollène et du Nord Vaucluse se sont armés en récupérant des armes abandonnées au moment de la défaite des armées françaises en juin 1940, sur l’ennemi par des coups de mains audacieux et dans les gendarmerie de la région.

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1943-1944 : La répression s’amplifie

 

Dans les premières années de l’occupation ce sont surtout les communistes qui sont victimes de sanctions administratives, perquisitions, arrestations, déportations.

A partir d’août 1943, la répression va s’étendre à tous les Résistants, gaullistes et autres « suspects » d’opposition au gouvernement de Vichy.

Dans un rapport daté du 5 octobre 1943, le Préfet du Vaucluse signale : « de nombreuses arrestations effectuées dans les milieux « daladiéristes » par les autorités allemandes ont provoqué une vive émotion. Plusieurs personnalités ont quitté leur domicile pour une destination inconnue afin d’échapper à une éventuelle arrestation ».

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Un acte de barbarie

 

Le 24 février 1944, des troupes d’opération allemandes arrivent à Bollène. Il s’agit d’un groupe de WAFFEN S.S. N° 56136 A

« Après un attentat commis à Pont St Esprit le 28 février, une perquisition a été opérée dans les immeubles du hameau de La Croisière, M. BERARD Pierre, âgé de 72 ans a été arrêté le même jour et fusillé le 29 février à 16h ».

(Rapport du commissaire de police de Bollène – A.D. VAUCLUSE 6W37)

 

La population bollénoise est consternée et indignée. Pourquoi cet acte de barbarie vraiment odieux ?

 

Grâce à un rapport établi par M. REYNAUD – LACRUZE, inspecteur général de la « nationale Vie » à Lapalud, on en sait un peu plus sur les circonstances de l’arrestation de M. BERARD : « sa maison a été visitée et fouillée. On aurait découvert dans une chambre un vieux revolver, non chargé, et pour ce seul motif, M. BERARD, emmené sur l’heure avec ses vêtements de travail, aurait été immédiatement fusillé…Les enfants n’ont jamais reçu confirmation de cette exécution sommaire…Jamais les BERARD ne se sont livrés à quelque activité politique, gens honnêtes, irréprochables, occupés à travailler leurs champs ».

(A.D. Vaucluse – 6W37)

 

Les autorités civiles n’ont jamais pu savoir, ni le lieu de l’exécution, ni le lieu de l’inhumation.

Suite à des démarches, le commandant des WAFFEN S.S.s’est refusé à tout renseignement et s’est contenté de délivrer un certificat de décès ainsi libellé :

« M. Pierre BERARD,cultivateur à Bollène, a été fusillé le 28 février 1944 par les troupes allemandes pour détention illégale d’armes à feu »

Signé : Le Colonel Baron de WECHMAR

 

L’exécution sommaire de ce bollénois est un véritable assassinat, perpétré par les WAFFEN SS, unité spéciale de l’armée allemande dans laquelle on trouve des « français » au casier judiciaire souvent bien rempli, véritables tueurs qui torturaient les patriotes à la citadelle de Pont St Esprit et qui se livrèrent à l’horrible massacre de la population d’ORADOUR s/GLANE.

 

Pourquoi cet acte barbare contre un vieillard inoffensif ?

Est-ce un exemple, parmi bien d’autres, de l’idéologie nazie ayant pour but de tuer, tuer sans motif bien défini pour imposer par la terreur, aux peuples occupés, la domination des seigneurs du 3ème Reich ?

Ou bien seulement un acte de nervosité d’une soldatesque qui sent venir une défaite prochaine ?

 

Quoi qu’il en soit, c’est un véritable crime de guerre qui est resté impuni !

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La commune a pris un air de deuil

 

Dès la décision prise par le gouvernement Pétain d’instituer un Service obligatoire du Travail, de nombreux jeunes du canton refusent de partir travailler en Allemagne, rejoignent la Résistance dans les maquis. Encadrés par d’anciens officiers de l’armée française ou par des résistants déjà aguerris des FTPF, ils participeront aux combats armés de la Libération.

Ce fut un autre chemin de la Résistance.

Ceux qui refusent de partir sont appelés « les réfractaires ».

 

Le commissaire de police de Bollène, appliquant les ordres du gouvernement de Vichy, se livre à une véritable chasse de ces jeunes patriotes.

Plusieurs de ses rapports en témoignent :

 

19 MAI 1943 :

« Le nommé QUEYTAN Aimé, manœuvre maçon, domicilié quartier St Blaise à Bollène, convoqué ce jour à Avignon pour le S.T.O., a été arrêté au TEIL par le commissaire de cette ville ».

 

4 JUIN 1943 :

« Un seul des 15 bollénois réquisitionnés pour le S.T.O. s’enfuit. Il s’agit de Lucien FEBRE ».

 

21 JUIN 1943 :

« Dans la soirée de dimanche, en collaboration avec la gendarmerie, j’ai procédé à une série d’interpellation sur la voie publique, de rafles dans les cafés et dans les salles de spectacles. La situation de plusieurs centaines de personnes a été examinée. Parmi elles, 27 jeunes gens de classes soumises au S.T.O. ont fait l’objet d’un examen approfondi de situation. Cinq jeunes gens réfractaires ou insoumis ont été appréhendés et seront conduits à la caserne de SALLES à Avignon.

 

Le lendemain 22 juin, j’ai fait transférer à Avignon 6 jeunes gens des classes soumises au S.T.O. ».

 

25 JUIN 1943 :

« Les recherches effectuées en vue de découvrir le nommé TAULEILLE LOUIS, 24 ans, qui devait être conduit à la caserne de SALLES n’ont donné aucun résultat.»

 

29 JUIN 1943 :

« J’ai fait conduire à Avignon, caserne de SALLES, le nommé CORNILLE André en vue d’un départ en Allemagne ».

 

5 JUILLET 1943 :

« En collaboration avec la gendarmerie, j’ai effectué hier dans les établissements publics une rafle nocturne.

La situation de nombreux jeunes gens accourus à Bollène pour y voir le comique FERNANDEL, a été examinée. J’ai appréhendé deux d’entre eux qui étaient dépourvus de carte de travail. Je les ai dirigés sur la caserne de SALLES. Il s’agit de DELARQUE CHARLES et BONFILS Marius ».

 

12 DECEMBRE 1943 :

« Quatre jeunes gens désignés pour le S.T.O. ont été appréhendés. Il s’agit de FAYOLLE Pierre, TIRAT Georges, CALCE Louis et SOLARI Antoine. Les recherches effectuées pour appréhender 12 autres jeunes gens n’ont donné qu’un résultat négatif…Cette vaste opération policière à laquelle j’ai procédé a sérieusement ému la population qui prend fait et cause pour les réfractaires et insoumis. C’est loin de faciliter notre tache ».

 

Le commissaire reconnaît par ailleurs « qu’à la réception des ordres de départ pour l’Allemagne la commune a pris un air de deuil ».

(A.D. Vaucluse)

 

Un certain nombre de jeunes Bollénois se sont cachés chez des amis ou dans des fermes. Près d’une centaine ont gagné les maquis.

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La garde de la voie ferrée : un total échec

 

Dans l’espoir d’entraver les actions de sabotage de la voie ferrée menées par les résistants, et à la demande des forces allemandes d’occupation, les communes furent tenues d’organiser la garde de la voie ferrée par des requis.

Dans ses rapports, le commissaire de police rend compte des résultats obtenus :

 

9 MARS 1943 :

« En collaboration avec le Maire de Bollène, toutes dispositions ont été prises pour la réquisition individuelle de 20 personnes qui dès ce soir à 18h30 assureront la garde de la voie ferrée sous la direction des gardes de communication. »

 

10 MARS 1943 :

« Cette nuit au cours d’une ronde en compagnie de l’adjudant de gendarmerie, j’ai pu constater que le service organisé sur la voie ferrée avec le concours de requis civils était loin d’être efficace. »

 

16 MARS 1943 :

« Au cours de divers contrôles effectués la nuit sur la voie ferrée, j’ai pu constater que les requis ne prennent pas au sérieux leur rôle et se désintéressent totalement de la mission qui leur est confiée. »

 

9 JUILLET 1943 :

« La population est mécontente de voir le nombre de requis pour garder les voies porté de 24 à 32. »

 

CONCLUSION :

La surveillance de la voie ferrée par des requis civils réquisitionnés dans la population, fut un total échec.

Beaucoup d’entre eux montrèrent une complicité évidente avec les équipes de résistants « saboteurs » et se gardaient bien d’intervenir.

Les actions de sabotage continuèrent et même se renforcèrent en 1943 et 1944.

 

Exemple d’un ordre de réquisition Pour assurer la garde de la voie ferrée durant la nuit

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La rafle du 11 mai 1944

 

Une note d’information provenant des troupes d’occupation en date du 15 mai 1944, indique que les autorités allemandes ont procédé dans la nuit du 11 courant à Bollène, à l’arrestation de 24 personnes. Souvent prises au saut du lit, chargées dans un camion sans ménagement et emmenées à la citadelle de Pont St Esprit de sinistre renommée. Ce sont des communistes, des gaullistes ou tout simplement des « suspects ».

 

La note donne la liste des personnes arrêtées :

- M. DUGAS Louis, ouvrier d’usine domicilié quartier de La Croisière

- Mme BOS MARIE Vve MONIER ‘’  ‘’  ‘’ 

- Mme MONIER Alida épouse DUGAS ‘’ ‘’ ‘’

- M LANNIC François, journalier agricole ’’ ‘’ ‘’

- Mme LANNIC Simone épouse AUVILLE ’’ ‘’ ‘’

- M. BIGNAN Louis, artisan maçon ‘’ ‘’ ‘’

(arrêté une première fois le 13/09/43, relâché le 01/11/43)

- M. MILLET Albert, cultivateur ‘’ ‘’ ‘’

- M. MILLET Maurice, ouvrier ‘’ ‘’ ‘’

- M. FARGE René, employé SNCF ‘’ ‘’ ‘’

- M. SEUZARET Louis, bûcheron ‘’ ‘’ ‘’

- M. PERDRIZET Jean, adjoint technique domicilé à Bollène

- M. PARMILLEUX Jean, agent général d’usine ‘’

- MME HUGUE Madeleine épouse PARMILLEUX ‘’ ‘’

- M. AUBENAS Alexandre, cartonnier ‘’ ‘’ ‘’ ‘’

- M. GIRARD Gaston, mécanicien, domicilié à Bollène

- M. VALABREGUE Georges, industriel ‘’ ‘’

- M. REYNAUD Louis, plombier ‘’ ‘’

- Mme MANOBRE Ema épouse AUBENAS ‘’

- Mme MANOBRE Marie, cartonnière ‘’ ‘’

- M. MONSCH HUBERT, ouvrier domicilié Quartier du PUY

- Mme BOURRET Andrée épouse REYNAUD, institutrice domicilié à Bollène

- M. PERDRIZET Emile, percepteur en retraite ‘’ ‘’

- M. BARSAMIAN Jacques, ouvrier ‘’ ‘’

- M. GARCIA Grégoire, ouvrier ‘’ ‘’

 

La plupart furent relâchés 8 ou 15 jours plus tard, après avoir subi un interrogatoire plus ou moins musclé. Quelques uns furent « tabassés » et affreusement torturés.

M. François LANNIC eut plusieurs côtes cassées à coups de crosses de fusil par des Waffen SS « français » déchaînés.

M. Louis DUGAS fut frappé à plusieurs reprises. Les tortionnaires voulaient savoir où se trouvait son fils Loulou DUGAS, combattant FTPF. M. DUGAS mourut quelques mois plus tard suite aux sévices endurés durant son séjour d’un mois à la citadelle. Il fut reconnu officiellement « mort pour la France ».

Les femmes ne furent pas épargnées. Gifles, coups de poing, et coups de pied pour tenter d’obtenir un renseignement.

Mme Simone AUVILLE, agent de liaison FTPF, Mmes Marie MONIER et Alida DUGAS, mères de jeunes résistants passés dans la clandestinité furent particulièrement maltraitées. On les obligeait à assister aux séances de tortures des hommes dans l’espoir qu’elles craqueraient et qu’elles parleraient.

M. Louis SEUZARET fut déporté en Allemagne et mourut à Bollène peu de temps après son retour. Il repose dans le petit cimetière de La Croisière.

Nous avons pu retrouver deux témoignages sur les tortures infligées aux patriotes enfermés dans cette sinistre citadelle.

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Témoignage de Mme MONIER Marie

 

« Chacun est interrogé à tour de rôle, au rythme des coups de crosse et des coups de pied. Les femmes sont obligées de rester debout, les mains sur la tête, durant des heures, à regarder les tortures infligées aux hommes, jusqu’à ce qu’elles perdent connaissance et s’effondrent.

Un des tortionnaires me demande :

- Où est ton fils ? Où se cache-t-il ?

- Je l’ignore

- Tu finiras bien par nous le dire

 

Les gifles et les coups pleuvent. Je me tais.

Durant une semaine, c’est le calvaire pour les femmes. Seuls les soldats italiens qui gardent la citadelle, manifestent un peu de pitié et nous apportent, en cachette, des couvertures et quelques croûtons de pain.

Au bout de dix jours, n’ayant pu obtenir aucun renseignement, je suis remise en liberté ainsi que MME DUGAS, ma belle-sœur. »

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Témoignage de M. René FARGE

 

« Je venais d’être nouvellement muté en gare de Bollène…Le 11 mai 1944, vers 4 ou 5 heures du matin, je fus réveillé par de violents coups frappés à la porte de ma chambre.

Deux hommes en civil, armés, me commandèrent de m’habiller et de les suivre. J’ai appris par la suite que c’étaient des miliciens…

Je me retrouvais avec des hommes et des femmes de tous âges dont certains notables de Bollène…

Un milicien nous tint un bref langage lourd de menaces : « Nous savons que la plupart d’entre vous sont des « terroristes ». Nous vous engageons à dire immédiatement la nature de vos véritables activités et le nom de vos complices. Il en sera tenu compte dans votre jugement. »Personne ne répondit.

Nous fûmes poussés dehors où une camionnette attendait pour nous conduire à la citadelle de Pont St Esprit. Dès notre arrivée, on nous fit aligner le long d’un mur dans une cour centrale et tandis qu’à tour de rôle nos étions dirigés vers la salle des interrogatoires, les autres attendaient, au garde à vous et les mains sur la tête. Cette position devient vite pénible et au bout d’un certain temps, insupportable.

Et puis, il y a l’angoisse, l’attente. L’angoisse de savoir exactement ce qui va nous être reproché, le retour d’un visage connu ou entrevu et déjà tuméfié, les plaintes de plus âgés et qui tout à coup s’écroulent sans un mot.

Enfermé avec d’autres pendant des semaines dans la même cellule, un peu de paille nous servant de litière, chaque journée fut plus éprouvante que la précédente.

Le plus terrible n’était pas l’incertitude de notre propre sort, ni de temps à autre, une privation de nourriture. Ce n’était pas non plus, pour les moins compromis, les interrogatoires musclés, mais les cris. Les cris de ceux qui journellement souffraient dans leur chair des coups toujours renouvelés et qu’on ramenait évanouis, le torse flagellé, méconnaissables…

Un jour…tout paraissait étrangement calme, lorsque l’un des nôtres, déjà fort diminué par les coups, fut entraîné devant un monstre. (comment l’appeler autrement).

Notre pauvre ami fut une nouvelle fois matraqué mais aucune question ne lui fut posée. Ce bandit avait donné libre cours à son sadisme congénital. Ce jour-là, nous avons vu pleurer un soldat italien, incapable de maîtriser son intense émotion.

Il y eut aussi ceux qu’on appelait dans la nuit et qu’on ne revoyait plus, les coups de feu qui signaient l’assassinat…

Beaucoup d’entre nous sont morts de mort violente ou bien ont disparu ensuite prématurément en raison des mauvais traitements encourus. Les uns et les autres ont été victimes de miliciens, de Waffen SS et d’agents de la Gestapo. »

M. René FARGE habite actuellement à ROGNONAS (Bouches du Rhône)et à accepté de nous faire parvenir cet émouvant témoignage.

 

 

C’est à la citadelle de Pont St Esprit que furent assassinés deux patriotes vauclusiens de MENERBES, Raoul SYLVESTRE et Marcelin PONCET. Leurs corps furent retrouvés dans le Rhône à ST Etienne des Sorts

Il en fut de même pour Georges ABAT de Valence.

Du pont sur le Rhône, il fut précipité dans le fleuve, une balle dans la nuque. On a repêché son corps en aval. Ses doigts crispés serraient sur son cœur, un chausson de sa petite fille Mireille, âgée de quelques mois.

Peut-on oublier ces crimes atroces qui dépassent l’imagination ?

 

Après la Libération, les anciens internés de la région de Bollène se sont retrouvés (Voir document)

à l’entrée de la citadelle de Pont St Esprit en partie détruite par les bombardements américains.

 

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Témoignage sur la torture

 

De nombreux internés de la citadelle de PONT SAINT ESPRIT ont subi dans leur chair d’effroyables sévices infligés par les Waffen SS « français » pour les faire parler. Nous avons pu retrouver le témoignage de l’un d’eux, M. LANNIC François de Bollène, arrêté le 11 mai 1944. Peu de temps après la Libération, il décrivait le cauchemar qu’il avait vécu à la citadelle.

« J’ai été frappé par les Waffen SS. J’ai enduré un véritable supplice sous les coups des hordes nazies et des français à leur solde qui nous ont vendus. Un de mes compagnons d’infortune MALIGNON Louis qui mérite le titre de Résistant, m’a sauvé la vie. J’ai été battu si fort par les Waffen que j’étais étendu à terre à demi mort et crachant le sang en abondance. Des coups sur tout le corps. 3 côtes enfoncées. Voilà le bilan… MALIGNON s’empressa tout de suite auprès de moi. Avec une couverture il me serra la poitrine et supprima ma douleur avec des cachets calmants Il arrêta mes hémorragies grâce à des piqûres qu’il avait fait rentrer clandestinement. »

 

Original du témoignage de M. François LANNIC

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Deux tortionnaires démasqués

 

A la Libération, deux tortionnaires de la citadelle de Pont St Esprit furent arrêtés et jugés par un tribunal à Avignon.

M. Aimé VIELZEUFdans son livre « Au temps des longues nuits » rapporte les aveux de ces deux tortionnaires, ROMAN et FUSTIER, au cours de leur procès :

« Le prisonnier tiré de son cachot avait les mains liées derrière le dos par un fil de fer. Puis par la porte qui donne presque sur le pont, les nazis le conduisaient sur l’arche marinière en fonte (aujourd’hui disparue). Le malheureux était poussé contre le parapet sud. Une balle dans la nuque, parfois deux, et le corps était basculé dans le fleuve… »

D’après FUSTIER « près de 2000 patriotes seraient passés par la citadelle. Quelques dizaines, faute de preuves, furent relâchés après un séjour plus ou moins long. Près de 1500 furent déportés, 100 à 150 peut-être, connurent la mort sur l’arche marinière. »

Au cours du procès, FUSTIER tenta de nier toute participation aux séances de torture.

M. LANNIC François de Bollène, arrêté le 11 mai 1944 fut appelé à témoigner. Soulevant sa chemise et montrant les cicatrices des côtes enfoncées à coups de crosse, il s’adressa à FUSTIER :

« Et ça, tu te souviens ! »*

Le WAFFEN SS tortionnaire baissa la tête et ne dit mot. Condamné à mort, il fut exécuté le lendemain.

(Témoignage de M. François LANNIC)

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Les internés de la citadelle

Auraient-ils été victimes d’une dénonciation ?

 

La note d’information émanant de la police allemande donnant la liste des Bollénois arrêtés, porte après chaque nom : « Arrêté le 11 mai 1944 pour un motif inconnu ».

L’arrestation n’a donc pas été motivée par un fait précis, connu de la police allemande.

Il semble plutôt que la liste ait été dressée par un habitant de la commune qui connaissait parfaitement les personnes arrêtées ;

 

Quelques semaines après la Libération du département, dans un rapport en date du 25 novembre 1944, le commissaire divisionnaire d’Avignon écrit :

« Etant en mission à Bollène, il m’a été signalé par le Comité local d’épuration, que M. T… , ex commissaire de police dans cette ville, avait inscrit de sa propre main, sur une liste de suspects, en vue de leur internement, les noms de quelques personnes qui, par la suite, ont été inquiétées ou arrêtées, notamment les nommés

-LACHAUX, percepteur déporté, LESPINASSE déporté, VARRAUD, instituteur, LANNIC, GOURJON et REYNAUD, plombier.

Questionné par des membres du Comité d’épuration, M. T… leur aurait déclaré avoir agi ainsi, sur les conseils du sieur CRUON, chef milicien en fuite.

D’une déclaration faite par les dames DELARQUE et BONFILS, il résulte aussi, qu’il aurait arrêté leurs fils le 15 juillet 1943 pour les faire partir en Allemagne comme travailleurs, alors qu’ils s’étaient présentés à lui pour obtenir une carte d’identité. »

(A.D. Vaucluse – Dossier 4W 3334)

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Le 28 mai 1944

Après la rafle du 11 mai, les SS reviennent à La Croisière et se dirigent vers la ferme SABATIER située quartier du PONT de la PIERRE. Ils viennent arrêter un des fils Henri, jeune combattant du groupe FTPF de La Croisière. Son frère Georges raconte :

« C’était le 28 mai 1944. Trois heures du matin ; deux voitures arrivent en trombe dans la cour de la ferme ; six hommes descendent, sonnent ; ma mère ouvre les volets de sa chambre : « Police allemande, ouvrez-nous ! » Ma mère descend, ouvre la porte, ils montent les escaliers en trombe, ils ne se trompent pas, la chambre d’Henri, Henri n’est pas là, ils touchent les draps, ils sont froids : « où est votre fils ?  Il est à AVIGNON, il n’est pas rentré. » Ils font le tour des chambres, celles de mes sœurs, puis ma chambre : « Petit tu ne bronche pas, nous allons revenir. »

Deux hommes restent dans le couloir. Il me faut partir ! Ma mère et mes sœurs m’embrassent. Je descends : « Où vas-tu ? Je vais donner à manger à mes chevaux… »

Me voilà sorti de la maison, il faut ramper car ils sont une vingtaine d’hommes armés autour d’un camion. Je dois longer le LAUZON pour arriver à la ferme CHARET où Henri et d’autres camarades se cachent. Les avertir, prendre des décisions, déménager des armes, des explosifs ; il y a des miliciens et des allemands partout et à la ferme trois femmes…On passe la nuit à l’abri dans un cabanon isolé dans les bois. Un voisin résistant vient nous avertir, on déménage vers la DROME. La maison est toujours occupée y compris la nuit par des miliciens. Quelle nuit d’angoisse pour ma mère et mes sœurs.

Le samedi, l’occupation se renforce : police de Vichy, SS. Dans l’après midi un gradé allemand vient informer ma famille que la maison va être détruite à l’explosif, il pose un gros colis sur la table : « Vous avez deux heures pour déménager ! »

Mes sœurs attellent un cheval à une charrette et chargent quelques affaires, les miliciens et les SS dévalisent la maison. Elles partent vers le PONT de la PIERRE et attendent…

Le gradé revient avec des hommes : « si vos fils se rendent, nous vous rendrons tout, pour le moment votre » maison ne sera pas rasée.

Les jours passent, elles assurent toutes les trois les travaux de la ferme, elles se font aider quand c’est possible avec le balai incessant des SS et de la milice.

Dans la DROME, j’avais quelques nouvelles de la maison, avant le 28 mai nous avions emporté des armes de la ferme. Que se serait-il passé autrement ?

Début août, Henri vient me voir dans la DROME ; c’est la dernière fois avant sa disparition à LYON vers le 11 août…

 

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Perquisitions et pillages

 

Les bollénois supportent mal la présence Des Waffen SS et le couvre feu

 

« Des troupes d’opération allemandes sont arrivées à Bollène le 24 février 1944. Il s’agit d’un groupe de Waffen SS. Dès leur arrivée, ils ont procédé à des réquisitions de logements. Certains propriétaires ont été expulsés de leur domicile, entre autre :

M. BRUNEL, M. TOURTIN, Mme VIOLES, M. BROUANT, Mlle WEISS, Mme BOUSQUET, MME LEZER. Ces quatre derniers étaient membres du corps enseignant et logeaient dans les écoles.

Le couvre feu a été fixé à 21 h. Les cafés doivent être fermés à 20h. Seuls le café Hôtel de la Mairie et le café de l’UNIVERS sont autorisés à rester ouverts aux troupes jusqu’à 23h.

Des camions et des hommes sont requis tous les matins pour effectuer des transports. Des femmes pour les cuisines et les chambres d’officiers ont été requises.

Les écoles communales sont toutes occupées par la troupe ».

(A.D. Vaucluse)

 

Les incidents avec les occupants se multiplient. Déjà le 12 novembre 1943, le commissaire de police signale :

« Ce matin à 11h, un incident s’est produit au domicile de M. BRUNEL Hyacinthe où la domestique refusait l’entrée de la maison à des officiers de l’armée allemande qui venait voir les logements. A la demande de ces officiers, je me suis rendu sur les lieux….J’ai pu les calmer qui, il faut bien le dire, avaient été reçus vertement.

La nouvelle du couvre feu à 18h, a jeté la consternation dans tout le pays ».

Trois mois plus tard, M. BRUNEL était chassé de chez lui.

 

Avec la présence des Waffen SS qui ont une triste réputation, la tension va monter dans la population.

C’est ce que montre les rapports du commissaire de police :

 

1ER MARS 1944 :

« A 6h, du matin, un incident a eu lieu entre un civil et une patrouille allemande. Le nommé AUTRAN Charles, domicilié Bd Victor HUGO à Bollène, qui s’apprêtait à quitter son domicile, ayant allumé une lampe électrique pour rechercher le trou de la serrure de son portail, au moment où une patrouille passait, a failli être tué par trois balles de mousqueton.

(A.D. Vaucluse –6 W 37)

 

23 AVRIL 1944 :

« A la suite des distributions de tracts de la semaine passée, je me montre excessivement sévère en ce qui concerne la circulation après l’heure du couvre feu.

9 procès verbaux ont été dressés…J’ai arrêté une vingtaine de personnes qui continuaient à enfreindre le règlement de la circulation de nuit. »

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Une population excédée par les pillages

 

Voici quelques exemples signalés par le commissaire de police :

 

« Le 29 février, trois militaires de l’armée allemande, se sont présentés chez M. ROCHE, quartier de l’Etang à Bollène. Ils se sont fait remettre 15 œufs et du vin.

Ces trois militaires se sont ensuite rendus chez M. CHARMAISON Georges…où après s’être fait remettre de l’eau de vie, se sont emparés d’un poste de T.S.F. »

 

3 MARS 1944 :

« Au cours de la perquisition chez M. MARROU Marius, la police allemande s’est emparée d’un cochon, de volailles et divers objets…

Chez m ; VALKE Henri d’un poste de T.S.F….

Chez M. ROUSSIER Jean, d’un poste de T.S.F. du linge et une somme de 20 000F. La population reste consternée et anxieuse. »

 

« Dans la journée du 2 mars 1944, une quinzaine d’agents de la police allemande ont opéré des perquisitions à Lamotte du Rhône. Les deux fils de M. MICHEL (19 ANS et 16 ans) ont été arrêtés et relâchés (6 fusils de chasse avaient été découverts) ».

(A.D. Vaucluse – 6 w 37)

 

11 MAI 1944 :

Au cours d’une opération de police à La Croisière, les S.S. pénétrèrent chez Mme BLACHERE âgée de 80 ans et firent main basse sur l’argent, le poste radio et une bicyclette.

 

La population bollénoise est de plus en plus excédée par les exactions de la police allemande et des Waffen SS et supporte de plus en plus mal leur présence. Plusieurs habitants réagissent. Le commissaire de police dans son rapport note « que le 29 février 1944, quelques particuliers se sont présentés pour déposer plainte pour vol. De l’argent et certains objets ont été dérobés.

Le capitaine commandant le détachement Waffen SS, nous a informés que vue l’hostilité en général de la population contre les troupes allemandes et la grossièreté de certains habitants, le couvre feu serait fixé à 21h à compter du 1er mars 1944.

 

La population est très émue par les perquisitions qui ont eu lieu hier au quartier de La Croisière. »

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Les nazis pillent leurs victimes

 

A chaque arrestation, les nazis en profitaient pour piller. Le gouvernement Français, malgré ses promesses, n’a jamais dédommagé les victimes.

 

Voici un document qui parle….

assassinat de M. BERARD le 29 février 1944, les arrestations de la famille ROSENBERG le 2 mars 1944 et de 24 bollénois le 11 mai 1944 soulèvent l’indignation de toute la population et font l’objet de nombreux commentaires.

La peur d'un policier de Vichy

Le commissaire de police reçoit des lettres de menaces et commence à prendre peur. Il note « que la population est nerveuse et de plus en plus hostile au gouvernement de Vichy et aux collaborateurs locaux ».

Il écrit au Préfet du Vaucluse : « L’association des « Chevaliers du coup de balai » m’a envoyé une fois encore, une lettre contenant des menaces de mort ».

Inquiet, il réclame l’envoi de policiers pour renforcer les effectifs de son commissariat.

(A.D. Vaucluse – 3 W 19)

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Premières attaques contre les allemands

 

C’est dans cette atmosphère agitée que vont se développer les premières actions armées contre les forces d’occupation nazies et la milice à son service.

 

« Déjà le 31 août 1943, à 16h30, quatre agents allemands en civil ont été attaqués par des individus à Bollène La Croisière. Un allemand a été tué, un autre grièvement blessé. Les agresseurs occupaient une voiture Citroën. Les barrages établis par la gendarmerie n’ont donné aucun résultat. La voiture transportant les auteurs de l’attentat a été retrouvée le 3 septembre à Pont St Esprit. »

 

« Le 15 mars 1944 à 24h, plusieurs coups de feu ont été tirés sur un militaire allemand en sentinelle à Lapalud, rue St Joseph. Ce militaire a été blessé à l’épaule.

(A.D. Vaucluse. Rapport des R.G.)

 

L’année 1944 va commencer. Beaucoup pensent que ce sera l’année de la Libération et la fin du cauchemar.

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